Infirmière clinicienne spécialisée, Infirmière praticienne : quelles différences ?

La distinction est ténue. Mais elle a toute son importance. Quelle est la différence entre les infirmières cliniciennes, les infirmières cliniciennes spécialisées et les infirmières praticiennes ? Le point. 

Infirmière clinicienne spécialisée, Infirmière praticienne : quelles différences ?

« Ce sujet mérite une clarification en raison d’un usage ou mésusage de certains termes », fait savoir Christophe Debout, IADE, PhD et membre du Comité formation réseau
de pratique avancée du Conseil international des infirmières.

Pour être le plus précis possible, il utilise comme cadre de référence celui du Conseil international des infirmières du réseau de pratique avancée. « Le terme d’infirmière de pratique avancée (IPA) est utilisé comme un terme faîtière qui regroupe en son sein les infirmières cliniciennes spécialisées et les infirmières praticiennes, explique-t-il. Elles présentent deux fonctions distinctes et complémentaires, avec des caractéristiques propres et communes. »

Initialement, les deux fonctions ont pour creuset les Etats-Unis, où elles sont apparues au 20e siècle. En 1940, pour les infirmières cliniciennes spécialisées sous l’égide d’Hildegarde Peplau dans le domaine de la psychiatrie.

L’infirmière praticienne a quant à elle vu le jour dans le milieu des années 1960 à l’initiative de Betty Ford dans le champ de l’accès aux soins pour les enfants. Les deux profils ont rapidement été formés au niveau Master dans le cadre de deux programmes distincts. Désormais, il s’agit, aux États-Unis, d’un doctorat professionnel. 

L’infirmière clinicienne spécialisée

Comme son appellation l’indique, l’infirmière clinicienne spécialisée, est centrée sur un champ spécialisé (soins aigus, santé mentale, santé de la femme, santé publique, pédiatrie, gérontologie) bien particulier. « Son activité clinique se déroule auprès des patients dont le diagnostic de pathologie a déjà été posé et qui présentent des situations de soins complexes », indique Christophe Debout.

Elle est experte en soins infirmiers, une expertise clinique qui lui donne une légitimité pour intervenir auprès des équipes soignantes : transferts de connaissances, utilisation des données probantes dans la pratique, projet d’amélioration de la qualité, introduction de l’innovation et du changement. Elle est censée impulser des réflexions dans les services en lien avec l’encadrement mais elle n’a pas la fonction de cadre et n’entretient aucune relation de type hiérarchique avec les autres soignants.

L’infirmière praticienne

L’infirmière praticienne est généraliste et peut donc intervenir auprès de différentes populations. « La grande différence par rapport à l’infirmière clinicienne spécialisée tient au fait qu’elle aborde les patients en premier recours, ceux dont le diagnostique n’a pas encore été posé », rapporte Christophe Debout.

En plus de son diagnostic infirmier, elle pose un diagnostic de pathologies. « Elle détient un double regard, ce qui favorise une approche globale du patient », estime Christophe Debout. L’infirmière praticienne assure la prise en charge du patient et cherche à identifier la nature de ses problèmes de santé.

Ayant accès à la prescription, elle propose ensuite un projet thérapeutique. « Elle peut aussi orienter le patient lorsqu’elle estime que son état clinique nécessite d’autres compétences que les siennes », fait savoir Christophe Debout.  Son focus est centré sur l’activité clinique, elle n’intervient pas auprès des soignants.

L’hybridation française

En France, l’IPA constitue une sorte d’hybridation entre les deux fonctions. Le profil se rapproche cependant davantage des caractéristiques des infirmières cliniciennes spécialisées. Ces IPA se répartissent actuellement en quatre domaines de certification : oncologie et hémato-oncologie ; maladie rénale chronique, dialyse et transplantation rénale ; pathologies chroniques stabilisées et polypathologies courantes en soins primaires, et enfin psychiatrie et santé mentale.

Le référentiel de compétences fait état d’une activité à la fois clinique et à destination des équipes même si l’activité clinique est privilégiée. « Il est évident qu’elles constituent un nouveau maillon pour gérer des files actives de patients adressés par les médecins », souligne Christophe Debout.

Et de poursuivre : « Idéalement en France, nous aurions besoin des deux profils. » Mais actuellement, pour certains professionnels de santé, l’accès aux infirmiers en premier recours reste compliqué à concevoir.

Laure Martin

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Les infirmières cliniciennes certifiées

En France, historiquement, l’introduction de la filière clinique a eu lieu dans les années 1990, avec un nombre important d’infirmières ayant préparé un premier niveau d’infirmières cliniciennes certifiées. Elles veulent généralement développer leur expertise clinique. « Elles souhaitent approfondir les acquis de leur formation initiale et s’inscrivent dans des cursus hors filière universitaire, dans le cadre d’une formation certifiante et non qualifiante », explique Christophe Debout.

Ce type de formation les aide à développer leur raisonnement clinique. Elles sont issues de tous les domaines d’activités et modes d’exercice ouverts aux infirmiers. Beaucoup, en établissement de santé, exercent dans les équipes mobiles de soins palliatifs, douleur et gériatrie. De nombreuses cliniciennes certifiées exercent en libéral. « Avec cette formation, elles vont généralement être plus performantes dans leur quotidien, ajoute-t-il. Un bénéfice réel se dégage pour les patients et les équipes dans lesquelles elles évoluent mais elles ne peuvent malheureusement pas prétendre à une rémunération supplémentaire. Le système ne leur donne pas de reconnaissance sociale et officielle à la hauteur de la contribution qu’elles apportent. » Il s’agit néanmoins d’un bon tremplin pour la formation IPA.

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