DU Plaies et cicatrisation : utile en libéral et à l’hôpital

De nombreuses formations universitaires permettent aux infirmières de mieux prendre en charge les plaies et de favoriser leur cicatrisation, problématique transversale à quantité de disciplines. Plusieurs infirmières, salariées et libérales, expliquent en quoi ces diplômes universitaires ont largement accru leurs compétences.

« Les plaies et leur cicatrisation sont une problématique qu'on retrouve dans toutes les spécialités », observe Saiqa Ghulam, infirmière libérale. Mais comme elles ne relèvent pas directement d'une spécialité particulière, elles font généralement l'objet d'une attention secondaire alors que la cicatrisation retarde parfois la sortie d'un patient... Selon cette infirmière, qui forme désormais des collègues libérales et salariées, la part de la formation initiale consacrée au sujet est très variable d'une école à l'autre. Elle a choisi de se former en suivant un diplôme universitaire en 2010. « J'étais infirmière dans un centre de rééducation pour les grands brûlés et on m'a proposé de devenir référente en plaies et cicatrisation pour l'établissement, alors j'ai demandé à suivre ce DU. »

Eva Delarras, libérale elle aussi, se trouvait parfois démunie, seule devant les problématiques de plaie qui concernent, « de façon aiguë ou chronique, 30 à 40 % des patients du cabinet ». Elle a donc suivi en 2016 un DU sur le sujet, en même temps qu'une de ses deux consoeurs du cabinet.

Delphine, infirmière dans un service d’hospitalisation à domicile (HAD), s'est vue proposer de suivre un DU par sa cadre. « Nous suivons souvent des patients en soins palliatifs, d'autres avec des escarres, des poches de stomie, des pansements complexes ou des TPN thérapies à pression négatives », explique-t-elle. A l'occasion de courtes formations par des laboratoires, « je me suis rendue compte que j'avais besoin de renforcer mes connaissances », poursuit-elle.

Kristell Le Bras, quant à elle, travaille dans le service Plaies et cicatrisation du centre hospitalier de Paimpol (Bretagne), où les infirmières sont encouragées à suivre un DU. « Les patients sont hospitalisés dans l'unité quand ils présentent une plaie qui s'aggrave, pendant quinze jours, parfois plus », explique-t-elle.Le service compte dix-huit lits et propose des consultations infirmières, d'autres avec un chirurgien vasculaire. Des infirmières du service réalisent aussi des détersions au bloc sous anesthésie générale et certaines se rendent à domicile, à la demande des infirmiers libéraux, pour les  conseiller sur certains soins et le choix des pansements. Elle termine bientôt son DU.

Des cursus variables selon les DU

De nombreuses universités proposent un DU sur les plaies et cicatrisations. Au-delà des fondamentaux théoriques, le rythme et la forme du cursus varient : des stages ici mais pas là, un ratio variable entre enseignements théoriques et pratiques, parfois un mémoire mais pas toujours...

Les infirmières interrogées apprécient généralement les échanges avec les formateurs, spécialistes de plusieurs disciplines, et, surtout, entre professionnels d'horizons différents. « Certaines étaient libérales, d'autres travaillaient en HAD, en Ehpad..., souligne Delphine. Il y avait des jeunes, des plus expérimentés et nous nous sommes rendu compte que nous avions les mêmes problèmes. Nous avons beaucoup échangé sur les solutions et nous avons remarqué une tendance à perpétuer des pratiques alors qu’il est parfois possible de faire autrement. Se poser ces questions permet d'évoluer. »

Kristell a aussi apprécié les stages qu'elle a pu faire dans différents services. « C'était court mais nous avons pu observer la façon de travailler des infirmières, leur demander les raisons de leurs choix... » Saiqa aurait aimé en faire mais son DU n'en prévoyait pas alors, raconte-t-elle, « j'ai été voir tous les centres de références en plaies de mon secteur et j'ai passé une journée dans chacun pour avoir idée des spécificités de leurs pratiques ».

En fonction de leur expérience et de leur cadre d'exercice, les infirmières s'intéressent plus à tel ou tel aspect des enseignements : pied diabétique, plaies ulcéreuses, traitement X ou Y... « Les travaux pratiques étaient très intéressants, souligne Eva. J’ai pu pratiqué la mise de compression, la détersion par le jet-à-goutte ou la Vac (Vacuum Assisted Closure) à pression négative, que je ne connaissais absolument pas. »

De la remise en question à la valorisation des connaissances

Le travail sur un mémoire a permis à celles qui ont du en réaliser un d'explorer à fond une thématique fréquente dans leur pratique. Les plaies veineuses et les calcinoses sous cutanées pour Kristell : « c'est un cas assez rare mais on en a plusieurs dans le service... J'ai beaucoup appris sur les hypothèses de les causes et cela m'a permis de voir ce qui se fait ailleurs ».

Eva a fait porter le sien sur la prévention de la plaie du pied diabétique et en a profité pour créer une fiche ad hoc qui sera désormais utilisée dans la Maison de santé pluriprofessionnelle (MSP) où elle travaille. Sa collègue a quant à elle conçu une fiche de suivi des plaies, déjà utilisée par les professionnels de la MSP.

Delphine, quant à elle, a choisi de travailler sur la détersion mécanique des plaies : « une vraie remise en question, résume-t-elle. C'est un geste difficile que nous n’apprenons pas à l'école. Il faut savoir quand s'arrêter. Or l'infirmière à domicile est seule avec le patient »et elle hésite parfois. Celles qui ont suivi le DU, en accroissant leurs compétences, ont gagné en assurance. Elles sont aussi plus reconnues par les professionnels, infirmiers et médecins, avec lesquels elles travaillent.

L'infirmière d'HAD souligne le changement de positionnement qui découle de la formation. « On ne se pose plus d'abord la question du type de pansement qu'on va utiliser, rapporte-t-elle. C'est au contraire la dernière qu'on va se poser. On se demande d'abord pourquoi cette plaie est apparue et sur quel terrain. Le patient est-il diabétique, artéritique, dénutri ? Quels médicaments prend-il ? Quels sont ses appuis ? L'approche, beaucoup plus globale, prend en compte de multiples facteurs. »

Depuis qu'elle a obtenu son DU, elle remplit la fonction de référente en plaies et cicatrisation pour son service de HAD. Elle a formé ses collègues infirmières aux principes de base et elle a créé et mis à leur disposition une « matrice » qui favorise le suivi des plaies et les échanges avec les services qui gravitent autour des patients.

Pour Kristell, ce DU diversifiera ses activités puisqu'elle pourra ainsi participer aux interventions à domicile et au bloc. De son côté, Saiqa est devenue libérale après son DU et anime depuis un an et demi le groupe « plaies et cicatrisation » d'une association locale de professionnels libéraux. Ils ont déjà rédigé des protocole sur différents types de plaies. Dans le cadre de cette association elle a aussi monté un projet de consultation graduée « plaies et cicatrisation » qu'elle a déposé à l'ARS...

Au-delà du DU, « l'expérience est très importante ainsi que le fait de maintenir à jour ses connaissances », insiste l'infirmière qui ne manque aucune journée de la Société française et francophone des plaies et de la cicatrisation dans sa région ni la journée nationale des référents « plaies et cicatrisation ».

Pour aller plus loin : formation continue DPC en Plaies et Cicatrisation pour les infirmières et infirmiers libéraux

Olivia Dujardin

Actusoins magazine pour infirmiere infirmierCet article est initialement paru dans le numéro 25 d'ActuSoins magazine 
(Juin/Juillet/Août 2017).

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