Assurance maladie : les pistes d’économies à la loupe

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Diminuer la durée des séjours en maternité, mieux dépister le cancer du sein, limiter le recours aux IRM : l'Assurance maladie détaille les pistes  visant à améliorer la qualité des soins tout en réduisant les coûts, dans un rapport examiné jeudi 26 juin par son conseil d'administration. Le point sur les six principales pistes.

©Creative Commons Flickr Réduire à trois jours les séjours en maternité : une piste proposée par la CNAM

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Réduire à trois jours les séjours en maternité : une piste proposée par la CNAM

Avec la présentation de son rapport annuel en conseil d'administration, la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) a dévoilé le 26 juin plusieurs "mesures concrètes" visant à réaliser des économies sur les dépenses de santé. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a fixé un objectif de 3,5 milliards d'euros d'économies en 2015, et de 10 milliards d'ici à 2017.

Réduire le nombre d'IRM

S'agissant des actes diagnostiques, le rapport montre que l'imagerie représente 3,8 milliards (+2,8 %) des 8 milliards d'euros remboursés en 2013 au titre des actes techniques. Parallèlement, les échographies ont progressé de 4,5 % en volume et de 4,3 % en montants remboursés, et les IRM de 9,1% en volume et +5,8 % en dépenses.

La caisse observe que "sur les 3,3 millions d'IRM réalisés en 2013, plus d'un million sont des IRM du membre inférieur" (+6,7 %), et 830 000 des IRM des os et des articulations du cou et du tronc (+11 %).

"La fréquence très élevée des actes d'IRM des membres inférieurs (...) pose la question de la pertinence de leurs indications"Pour 52% des bénéficiaires, elle n'a pas été précédée d'une radiographie, comme le recommande la HAS (Haute autorité de santé).

L'utilisation de l'IRM pour l'exploration des lésions des membres est d'ailleurs "très supérieure" en France par rapport aux pays européens et nord-américains. Les dépenses liées ont progressé de 5,8% l'an passé, soit deux fois et demie plus rapidement que l'ensemble des dé­penses de santé.

"On peut estimer, en première approche, qu'une réduction de 15 % du nombre d'IRM des membres inférieurs pourrait être obtenue sans perte de chance pour les patients", estime l'Assurance maladie. Soit une économie de 60 millions d'euros.

Raccourcir les séjours en maternité

L'Assurance maladie juge, par ailleurs, qu'il existe selon elle, "un potentiel de réduction significative de la durée moyenne de séjour et corrélativement du nombre de lits de maternité".

A la différence de ce qui est observé dans les autres pays européens, les femmes françaises et leurs nouveau-nés restent 1,2 jour de plus en observation hospitalière, soit 4,2 jours contre 3 ailleurs (moyenne des pays de l'OCDE).

Réduire la durée du séjour en ma­ternité est non seulement "possible", estime l'assurance maladie, mais permettrait de dégager 280 millions d'éco­­nomies, sur un total de dépenses et de prestations évalué à 9,1 milliards en 2012. A la sortie de l'établissement, un suivi et un accompagnement à domicile seraient en revanche aménagés pour faciliter le retour à domicile de la mère et de l'enfant.

Le programme PRADO lancé en 2010, qui permet aux mères de bénéficier d'un accompagnement à domicile à leur sortie, a été progressivement étendu et devrait bénéficier en 2014 à 210.000 femmes. "La mise en place de ce suivi organisé permet d'accompagner dans de bonnes conditions la réduction des durées de séjour".

Mieux dépister le cancer du sein

Le rapport se penche également sur la prise en charge du cancer du sein, à l'origine de 12.000 décès par an. Ce cancer a représenté une dépense de 2,3 milliards en 2012 pour l'Assurance maladie, dont un peu plus de la moitié pour les soins hospitaliers.

Or, le taux de participation au dépistage est jugé "insuffisant" et les délais d'accès à la chirurgie trop importants : pourtant, "l'initiation des traitements au-delà de 30 jours a une incidence sur le taux de survie".

Par ailleurs, le potentiel de chirurgie ambulatoire (sans hébergement à l'hôpital) pour ce type de cancer est estimé à 50% à l'horizon 2020 (15% des femmes en ont bénéficié en 2012).

Recourir d'avantage à la chirurgie ambulatoire

Plus généralement, l'Assurance maladie relève que le taux de chirurgie ambulatoire s'est accru de plus de 10 points en six ans, passant de 32.3% en 2007 à 42,7% en 2013.

"On peut estimer que sur les 5,4 millions de séjours de chirurgie, 10%, soit environ 540.000, pourraient basculer de l'hospitalisation complète à la chirurgie ambulatoire", souligne le rapport.

Dès lors, le taux de chirurgie ambulatoire pourrait atteindre 55 % en 2017, selon l'Assurance Maladie. Le ministère de la Santé souhaite réaliser un milliard d'économies - sur les 10 milliards prévus d'ici à 2017 pour les dépenses de santé - grâce à des séjours plus courts à l'hôpital.

La Cnamts estime également pouvoir réduire chaque année de 33 000 le nombre de séjours hospitaliers, liés à la chirurgie du syndrome du canal carpien (14 700), à l'appendicectomie (4 180), la chirurgie de la thyroïde (3.780), la cholécystectomie (3 880) et l'amygdalectomie (6 750). L'économie réalisée avoisinerait 43 millions d'euros.

Limiter les prescriptions

La Cnam suggère aussi aux médecins de limiter leurs prescriptions : si les 23% de ceux "qui prescrivent en moyenne plus de 300 euros de médicaments s'alignaient sur ce chiffre (déjà élevé), la Sécu économiserait 400 millions d'euros", rapporte Le Figaro.

Rien qu'en antidépresseurs, observe le rapport de la Cnam, la Sécu a effectué 560 millions d'euros de remboursements en 2012. Elle estime de surcroît que l'usage des antidépresseurs est "non optimal", car plus de la moitié des patients interrompent leur traitement en cours de route.

Elle évalue aussi  à 25 millions d'euros l'économie globale par point de prescription supplémentaire dans le répertoire des médicaments généricables. Si la part du répertoire passait à 85 % des volumes dans le total du marché (contre 40% actuellement), l'économie supplémentaire serait de 1,1 milliard d'euros.

Fermer des services hospitaliers

Sujet politiquement sensible, selon Le Figaro, : il faut fermer de nombreux services hospitaliers dont l'activité ne répond pas au minimum requis pour soigner les patients en toute sécurité et éviter de dangereuses et coûteuses complications.

Dans le domaine de la chirurgie mammaire, elle note que seuls 37% des établissements ont une activité supérieure aux recommandations européennes. En chirurgie orthopédique, qui pèse un quart des dépenses de court séjour hospitalier, un établissement faiblement spécialisé et à faible activité a une probabilité de complications supérieure de 28% à un établissement très spécialisé.

Pour l'heure, aucune piste ne semble particulièrement privilégiée par la ministre de la Santé. Marisol Touraine attend aussi le deuxième rapport de l'assurance maladie, plus financier, qui doit être examiné le 3 juillet par le conseil d'administration pour aider le gouvernement à préparer le budget de la Sécu qui sera présenté à la rentrée.

Rédaction ActuSoins, avec AFP, Le Figaro, Les Echos, APM

 Lire le rapport de la CNAM

 

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Réactions

3 réponses pour “Assurance maladie : les pistes d’économies à la loupe”

  1. jo69480 dit :

    tout ça c’est de la poudre aux yeux. Une chirurgie en ambulatoire co^te plus cher qu’une chirurgie normale, je suis bien placée pour le savoir.
    Pour une opération pied,arthrodese orteil et resection têtes métatarsiennes hospitalisation de13h le 02 à 11h le lendemain 03, frais de séjour facturés un peu plus de 1000 euros à la clinique st charles;
    pour une reprise en ambulatoire pour infection suite à cette chirurgie rentrée à 14h et sortie le soir, frais de séjour plus de 2000 euros!!
    les centres de soins doivent jouer sur le type d’actes réalisés, c’est un scandale!! MMe marissokl Touraine devrait se pencher sur le problème des GHS!!

  2. Paulo dit :

    A la CNAV aussi il y a moyen de faire des économies. Certains préretraités sont obligés de liquider leur retraite s’ils ont une carrière longue. Ça devrait être interdit, car certains n’avaient pas trop le choix. Obliger leurs ex employeurs spécialistes de PSE à les payer jusqu’à l’âge légal de la retraite, leur interdire de passer le flambeau à la CNAV ou autre, un an ou deux ans avant l’âge légal !

  3. jlouis dit :

    Et si le gouvernement s’attaquait plutôt à ce que l’on sait déjà plutôt que de nous envoyer de nouveau de la poudre aux yeux :
    – stopper les AT abusifs, tout le monde sait que plus de la moitié ne sont pas justifiés
    – s’assurer que les soins sont dispensés à la bonne personne et non pas à un membre de la famille
    – contrôler les bénéficiaires de la CMU
    – dans un sens plus large, arrêter de faire de l’assistanat pour des personnes non justifiées, la FRANCE doit cesser d’être une vache à lait pour des personnes qui ne le méritent pas

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