Etudiants infirmiers : une génération sacrifiée ?

Etudiants infirmiers : une génération sacrifiée ?

Le nouveau cadre pédagogique est entré en vigueur il y a tout juste un an, changement radical pour aligner le cursus sur le système universitaire européen LMD. Finis les examens pratiques et stages notés, place à l’évaluation continue. Un an après la levée de bouclier qu’a suscité cette réforme, l’occasion pour ActuSoins de prendre le pouls de la formation infirmière.

De faux motifs d’inquiétude ?

Les étudiants en soins infirmiers (ESI), via certaines associations étudiantes se disent lésés et une partie des professionnels infirmiers dépassés. A entendre certains acteurs, c’est tout un système de valeurs qu’on aurait jeté à la curée. D’après Thomas Chrétien, président de la Fédération Nationale des Étudiants en Soins Infirmiers (FNESI), « les étudiants de première année ont essuyé les plâtres et se considèrent comme une génération sacrifiée ».

Déclaration moins fataliste qu’elle n’en a l’air. En effet la FNESI a mis en place « l’opération rentrée », en septembre 2010. Organisée conjointement avec diverses associations locales, elle visait à introduire et préparer au mieux les étudiants infirmiers à leur première année d’études.

Des Étudiants en Soins Infirmiers se disant souvent étouffés par le poids de l’enseignement universitaire même s’ils reconnaissent son utilité une fois plongés dans le cadre concret du stage. « Pendant mon premier stage, j’ai dû passer une grande partie de mon temps à faire un travail écrit sur le fonctionnement du CHSCT [Comité d’hygiène, de sécurité et conditions de travail] au lieu d’observer les soins. Un peu c’est intéressant mais la ça en devient inutile » relate une étudiante en 2ème année maintenant.

Une satisfaction qui tranche

Jane Laure Danan, vice présidente du Comité d’Entente des Formations Infirmières Et Cadres (CEFIEC) salue le travail des enseignants, « chevilles ouvrières de la mise en place de cette réforme » et se veut optimiste : « C’est de la contrainte que nait la créativité, c’est du questionnement que nait la recherche. Mais oui, les temps ont changé, force est de le constater ». Thomas Chrétien reconnaît d’ailleurs également que “les équipes pédagogiques s’investissent beaucoup”.

Toutefois, la CEFIEC, par la voix de sa vice-présidente, même si elle admire « les bénéfices incontestables de ce programme d’études, notamment en matière de découverte des enjeux de la profession au travers de stages longs », garde son esprit critique. Elle constate que l’introduction des sciences fondamentales présente une « visibilité […] globalement floue […] tant pour les enseignants que pour les apprenants ».

Les grands changements installent inéluctablement une période d’adaptation et provoquent parfois de vives inquiétudes. Dans cette réforme se mêlent la vision d’étudiants, naturellement inquiets, et de professionnels pas totalement au fait de ce nouveau plan de bataille.

On dit que faute d’examens pratiques notés, les fameuses MSP, les infirmiers que l’on forme seront des « bons à rien ». Mais restons prudents et pondérés ; ne disait-on pas la même chose quand en 2001 fut supprimé l’examen écrit de fin d’études ? Pourtant, des voix s’élèvent, côté étudiant comme formateur, pour approuver une mesure qui « favorise les échanges et influence positivement la relation pédagogique ».

Nouvelle donne

Avec son nouveau référentiel, la formation est passée de 4760 à 5100 heures et le Diplôme d’Etat des nouveaux étudiants a obtenu le grade de licence par décret ministériel du 23 septembre 2010. Dans la pratique, chaque Etudiant en Soins Infirmiers (ESI) bénéficie du suivi d’un cadre enseignant  pendant ses stages et un portfolio a été initié.

L’introduction de ce dernier fait couler beaucoup d’encre et « cristallise les inquiétudes » rapporte Jane-Laure Danan. Son intérêt semble poser question aux différents acteurs et son utilisation ne serait toujours pas pleinement intégrée par les encadrants. Les ESI rapportent fréquemment des professionnels trouvant cet outil mal adapté « aux réalités du terrain » et ne l’adoptant pas forcement. Une difficulté d’adaptation qui ne devrait être que transitoire, de l’avis même des formateurs et des ESI.

Mais la réelle réflexion concerne le futur clivage d’une profession à l’orée de 2012. A la manière dont ont pu (et peuvent encore) cohabiter infirmiers diplômés d’Etat et infirmiers de soins psychiatriques (ISP),  deux types de professionnels vont pratiquer un même exercice mais à niveau de diplôme et salaire différent. Les écarts seront certes moins importants mais les tensions peuvent naître parfois si facilement…Gageons en effet que si le tir n’est pas corrigé d’ici 2012, le « choc des cultures » risque fort d’être redoutable.

Joël Ignasse

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22 réactions

  1. C’est la politique de la pauvre Bachelot… qui veut de petit medecin a l’avenir pour palier au manque de medecin.. nous aurons des théoricien oui tout a fait.. malheureusement…

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  2. pour ce qui est de l’accueil des eide c’est vrai que dans certains services c’est pas top! mais je pense qu’il sont peut être en sous effectifs avec une charge monstrueuse de travail et parfois pas facile à gérer avec la présence d’un étudiant!!! par contre pour le contrôle des connaissances nous faisons des test et on questionne bcp l’élève et je sais que depuis l’arrêt du DE écrit nous rencontrons beaucoup de lacunes théoriques!!! et donc cela nous fait peur cette nouvelle réforme car en ans j’ai vu l’évolution des étudiants IDE et cela fait peur heureusement ils sont pas tous comme cela mais nous en rencontrons bcp même de trop!
    On verra dans l’avenir!!!!
    et ne nous donner pas la moral et la définition de notre profession car si on a choisi ce métier c’est d’une part une vocation et l’amour de ce travail et le contact avec les malades et apprendre pleins de choses!métiers passionnants mais qui risque de se dégrader!!!!

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  3. Je me suis peut-être mal faite comprendre : je ne fais la morale à personne, je ne me le permettrais pas et de plus je n’ai ni l’expérience ni le culot pour y prétendre.
    Je constate juste que nous sommes parfois accueillis par des “toi je te parle pas, elle est nulle ta réforme” (SIC!) un peu facile. Lorsque vous étiez élève IDE, vous n’étiez en rien responsable de votre programme. Auriez-vous voulu avoir été accueillie ainsi?
    Donc il temps à présent de marcher main dans main, et à être prêts, nous étudiants et vous encadrants à faire des efforts.
    Les sous-effectifs…bien sûr que c’est problématique pour un bon encadrement. Mais nos stages de dix semaines permettent une professionnalisation et une prise d’autonomie : le temps dépensé en début de stage est un bon investissement sur la suite de ce même stage! De plus pour pallier à ce manque de professionnels, la seule solution et d’en former, et des compétents! Donc les élèves présents…
    Si je suis là c’est que j’ai aussi choisi ce métier magnifique, et je veux juste pouvoir être formée correctement et dans le respect, sans avoir à subir les remarques et les préjugés sur la réforme.
    Quant aux connaissances, attendez de voir les premiers diplômés de la réforme, au vu du niveau de nos partiels, je pense qu’il est assez élevé …
    Notre diplôme n’est pas un diplôme au rabais.
    D’ailleurs je retourne à mes (difficiles) révisions de partiels…

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  4. désolé si je t’ai froissé ce n’était pas mon but! mais je suis surprise de ces propos de mes collègues diplômés et cela reflète d’un manque d’intelligence! nous ce n’est pas le cas et on n’a pas à faire ces choses là car vous n’y etes pour rien et il ne faut pas mélanger tout donc je suis d’accord sur ce point! vous savez former n’est pas toujours simple quand vous avez des étudiants qui se préoccupe quand est ce la pause vivement la fin de quard ou qui est assis à ne rien faire et j’en passe des vertes et des pas mures!!! le manque d’initiatives et de curiosité sur tous les domaines et sur les différents soignants!et je dois dire que quand nous avons des eide qui ont envie d’apprendre et que ce n’est pas un boulet et bien là c’est agréable car j’appends de nouvelles techniques et c’est formateurs dans les 2 sens!!
    je tenais à te remercier pour notre diplôme à rabais et nous aussi on n’a pas choisi cette méthode moi j’ai eu DE écrit et pratique avec le tfe! et sache que les professionnel qui t’encadre ont un diplôme à rabais comme tu le dit!
    bonne révision et attention ne prend pas la grosse tête!!! car la chute peut faire mal et n’oublie surtout pas ta technique et que c’est des patients que tu va soigné donc fait attention à ton expression!

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  5. Oups! Je dois effectivement avoir du souci à m’exprimer car JAMAIS je n’ai dit que votre diplôme était au rabais! J’ai juste dit que le nouveau ne l’était pas non plus.
    Au contraire, certaines des IDE qui m’on formée étaient supers, pédagogues et formatrices, et elles avaient reçu la formation de 1992 ou celle d’avant !
    C’est juste que c’est une critique qui est souvent émise sur notre nouveau diplôme : qu’il est au rabais. Je trouve ça dur de s’entendre dire ça dès maintenant, alors que nous ne sommes qu’étudiants. Quant au TFE, les modalités ne sont pas encore bien définies, mais j’espère qu’il y aura un écrit, je trouve ça hyper important.
    Voilà j’en suis désolée si je me suis mal faite comprendre évidemment 🙂 quand je l’ai vu je me suis arrachée de mes révisions mais je ne pouvait pas laisser passer un tel malentendu!

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  6. Je suis iade et il m’arrive, bien de rarement, d’encadrer des étudiants infirmiers en stage une semaine dans leur stage de bloc. Si j’ai eu la chance d’avoir quelques étudiants intéressés et motivés par leur futur exercice professionnel, je suis tombé bien souvent sur des personnes qui, une fois le module validé, se dépêchaient bien vite d’oublier le peu de connaissances qui leur avaient été enseignées. L’écrit de fin d’études avait ceci de bon qu’il obligeait l’étudiant à mobiliser ses connaissances et à les revoir régulièrement…Aujourd’hui, seuls les motivés le font, les autres se contentent de se laisser vivre, appliquant sans forcément en comprendre l’objectif, les gestes techniques qui leurs sont prescrits point. Semaine dernière encore, un pH à 7,18 n’avait inquiété ni la jeune DE, ni son étudiante, pas un appel, pas un coup de fil…Les ambus qui m’envoient grand père au bloc avec un INR au plafond…il croyait qu’il devait doubler ses AVK…Et quand viennent les remontrances, la réponse est toute trouvée: c’est pas notre rôle. Certes, créons deux grades: des infirmières techniciennes pures, formables en 6 mois, et les cortiquées, ce sera plus long mais profitable au patient.

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  7. ces futures infirmiers et infirmières comment vont-ils s’intégrer professionnellement ? avec le manque croissant d’infirmières non remplacées dans les services de soin, qu’elle pourra être leur intégration au sein d’une équipe pluridisciplinaire ??????????, je reste perplexe sur ce nouveau diplôme .

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  8. comme pour d’autres sujets (ordre infirmier, retraite A ou B …) les modifications tombent d’un seul coup sans que l’on demande leurs avis au principaux concernés … avaler des couleuvres de plus en plus lourdes à digérer – sans réagir – est malheureusement devenu une nouvelle spécialité infirmière …
    en France, il n’y a qu’une fois dans la rue que l’on commence à prendre les gens au sérieux, et çà devient même très sérieux si les manifestants cassent le mobilier urbain ou barrent les routes …
    alors s’il faut en passer par là, descendons dans la rue et cassons … comme les agriculteurs, les routiers …
    nous sommes quand même plus de 500 000, çà devrait faire du bruit et se voir dans les médias surtout si on y va tous en blouse blanche (encore qu’avec la neige …)

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  9. aux principaux concernés …

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  10. Voilà un vrai sujet dont l’Ordre Infirmier doit s’occuper, c’est du concret, du vécu et de l’actuel. C’est certainement beaucoup plus important que de théoriser sur des sujets à des années lumières des préocupations de ceux qui vivent l’exercice au quotidien.
    L’information doit remonter et des réfléxions doivent êtres engagées avec des mesures rapides pour remèdier à ce malaise.

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