Eloge de la campagne par une infirmière libérale

Eloge de la campagne par une infirmière libérale

Dans son billet “Eloge de la campagne”, la petite infirmière dans la prairie raconte la vie d’une infirmière libérale de campagneExercer en libérale, c’est exercer dans mille et un lieux. Des grandes agglomérations à la campagne en passant par les montagnes enneigées et les bords de mer agités, à chaque environnement sa spécificité.

Eloge de la campagne par une infirmière libéraleÊtre infirmière à la campagne présente un certain nombre d’avantages et mais aussi, il est vrai d’inconvénients.

À la campagne, le parc automobile étant nettement moins fourni, pas de bouchons, peu de coups de klaxon, presque pas “d’avance, espèce de c..”.

Bon d’accord, j’avoue on peut parfois rester coincé trois plombes derrière un tracteur en se disant ” non mais il le fait exprès de tenir toute la route, il va pas se pousser ce c…ard”, le tout en faisant de petits écarts pour que le conducteur nous voit. Et cela, toujours au moment où en retard, on a plutôt envie d’appuyer sur le champignon.

Ici, c’est aussi le paradis des voitures sans permis, celles qui ne dépassent pas le cinquante kilomètre-heure. Difficile de ne pas tomber sur ces spécimens et difficile de ne pas rester à attendre derrière, en soufflant des naseaux et en se demandant si à de telles vitesses, notre voiture ne va pas tout simplement s’arrêter.

De plus, peu de risques de se faire casser un rétro ou de prendre un p-v pour stationnement gênant. Il y a toujours une place libre qui nous attend (bon, à part peut-être les jours de marché et encore ce n’est pas les Champs-Élysées).

À la campagne, on ne se sent pas dépayser. À chaque pas effectué, on rencontre une tête familière. Toujours le bras levé, pour faire un petit bonjour.

Bon, c’est vrai que lorsque tu vas à l’épicerie avec ta petite dernière et qu’elle fait un caprice d’anthologie devant la moitié de tes patients, le gros avantage de connaître toute la population du village devient rapidement un vrai cauchemar (“donnez moi un trou de souris que j’y reste une bonne dizaine d’années”).

Mais bon, j’avoue, les ” bonjours Maaadame l’infirmière” me font bomber le torse et relever la tête. Les petits papis et les petites mamies ont encore du respect pour notre profession. Ils ont gardé ce petit je ne sais quoi de leur enfance où le médecin, l’instituteur, l’infirmière étaient des piliers dans le village.

À la campagne, tout le monde se connaît ou presque, du moins tous les anciens. Alors attention à ce que l’on dit car la personne à votre droite est peut-être le cousin du beau-frère de la voisine de la personne à gauche donc chut, discrétion de rigueur.

À la campagne, il faut avaler des tonnes de bouddha pour pouvoir téléphoner sans s’énerver car ici point de réseau 4G ni fibre en tous genres (la fibre, quésaco?).C’est une légende urbaine de penser que l’on peut téléphoner où l’on veut car tous les deux mètres le réseau fond comme neige au soleil.

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-“Oui, vous voulez un rendez-vous pour une prise de…allo, allo, je vous entends très mal. Je roule un peu et je vous rappelle”. Après cinq bons kilomètres, la barre tant attendue réapparaît sur mon portable, je suis garée au bord d’un fossé, prête à basculer dans la bouchure pour pouvoir téléphoner. Et c’est comme cela, tout au long de la journée. Heureusement, à force de “perdre le contact”, on connaît comme sa poche les “bornes réseau naturelles” (à côté de chez madame “un tel”, après le chemin qui va à la ferme de monsieur “machin”…) et les zones noires à éviter où réseau rime avec zéro.

À la campagne, l’hiver neigeux est synonyme de “plan galère affreux” (eh oui, ça rime). Ici, point de chasse-neige (et quand je dis chasse-neige c’est plutôt tracteur) avant huit heures du matin, le début de tournée se fait sur une neige immaculée, où tel Armstrong, votre véhicule fait ses premiers pas sur la lune, heu, sur la neige je veux dire.

À la campagne, tu n’as pas besoin d’être chasseur pour voir des bêtes sauvages. Non, il suffit, en bonne infirmière qui se respecte de prendre ta voiture tôt le matin et ainsi de voir défiler sous les lumières de tes phares lapins, renards et autres chevreuils. De quoi épater ton fils car en pro des bestiaux tu connais toutes les espèces de la forêt et tu sais faire la différence (et ce n’est pas rien) entre un lièvre et un lapin.

À la campagne, lorsque je pars tôt le matin, je ressens cette atmosphère silencieuse et sereine. Je roule, dans la nuit étoilée, sans lumières artificielles, la fenêtre entrouverte, humant l’air frais, avec juste le ronron de ma voiture. Ce paysage me convient. D’autres, préfèreront la ville, la montagne ou la mer. Peu importe, ce qui compte, c’est de se sentir bien, d’être en harmonie avec le lieu où l’on exerce son métier. Un métier où l’on passe des heures dans sa voiture, arpentant des kilomètres de paysages, où l’on est toujours dehors à toutes les saisons et par tous les temps. Un métier difficile certes mais qui se passera toujours mieux dans un environnement qui nous convient.

Moi, c’est la campagne que j’ai choisie.

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