Diététiciens : une profession en situation de statu quo

Diététiciens : une profession en situation de statu quo

Réingénierie de la formation initiale, définition d’une nomenclature des actes diététiques, protection du terme « nutritionniste » : les diététiciens ont l'impression d'un statu quo et appellent le gouvernement à faire bouger les lignes. En jeu, selon eux : l’amélioration de l’accès aux soins et donc… de la santé de la population.

Diététiciens : une profession en situation de statu quo

Le livre blanc des diététiciens, publié en Avril 2017, est clair : « la nutrition est une dimension fondamentale de la santé humaine ». Ce rapport, publié par l’AFDN (Association française des diététiciens nutritionnistes) à l’issue de ses différentes contributions lors de la Grande conférence de santé (2015), met en en exergue des incohérences entre les besoins de la population et son suivi diététique réel, notamment dans le cadre des prises en charge des pathologies chroniques et des ALD (Affections de longue durée).

« Les moyens ne sont pas donnés, explique Ghislain Grodard, vice-président de l’AFDN. Le gouvernement ne met pas à disposition une nomenclature permettant un remboursement sous forme de forfait d’un acte diététique en tant que tel. Il y a donc des disparités et des inégalités conduisant à des défauts de prise en charge”. 

Vers une refonte de la formation initiale…

Autre point soulevé par l’association : la réforme « nécessaire » des études. « La formation n’est plus adaptée et doit évoluer »,  explique Marie-Caroline Baraut, diététicienne, formatrice et auteure des ouvrages de la collection  Les Précis en diététique(Med-Line editions).

Aujourd’hui, deux voies d’accès permettent de devenir diététicien. Dix écoles publiques délivrent ainsi un DUT en Génie Biologique, option “diététique”, et onze écoles publiques et privées sous contrat proposent un BTS en diététique. D’autres (les écoles hors-contrat) offrent la possibilité d’une formation moins sélective, mais plus longue et plus onéreuse, permettant d’atteindre un « bachelor » ne correspondant à aucun programme agréé.

« Il faut uniformiser les études […] car toutes non pas le même contenu », estime Pierre Perochon, diététicien en SSR au Centre Hospitalier Louis Sevestre (37). « Les étudiants à l’IUT ont besoin de plus de formation car ils ne sont formés en diététique qu’à partir de la deuxième année. Quant au BTS, c’est un socle de connaissances qui a besoin d’être renforcé et actualisé constamment », précise Marie-Caroline Barault.

Les représentants des diététiciens attendent désespérément un décret d’application pour la loi du 30 Janvier 2007, qui établit la profession de diététicien. Ce texte d’application pourrait ainsi définir les modalités d’une formation unique ainsi que ses conditions d’accès. Ils aimeraient que celle-ci soit, par ailleurs, mieux adaptée aux besoins actuels de santé.

« Nous avons besoin de diététiciens mieux formés. Car en ville, la politique de santé veut engendrer un virage ambulatoire.  A l’hôpital, cela parait aussi indispensable car nous sommes confrontés à des situations de plus en plus complexes », complète Ghislain Grodard.

…et une universitarisation

Cette évolution devrait passer par l’universitarisation, selon l’AFDN.

« En France, contrairement à l’évolution constatée en Europe, la formation à ce métier reste inchangée : la formation initiale n’a pas été intégrée au cursus LMD, les diététiciens ne sont pas éligibles au dispositif du DPC (Développement professionnel continu) », explique l’association dans son livre blanc.

 Ces données poseraient problème : le niveau des diététiciens français serait largement inférieur à celui des professionnels des autres pays européens. « Au sein de la communauté européenne, la France, avec l’Allemagne, est le seul pays à proposer une formation initiale aussi courte. Les autres États proposent tous un niveau LMD », précise le livre blanc.

Si un nouveau référentiel d’activités a bien été rédigé en novembre 2011 par le ministère en charge de la santé et l’AFDN, aucun référentiel de formation n’a vu le jour depuis 1987 pour les BTS,  et depuis 2005 pour les DUT.

« Tout est prêt, mais juste en attente de volontés politiques », regrette Ghislain Grodrad, qui ne comprend pas que la situation reste ainsi figée.

 Des stages qui font défaut

D’autre part, les lieux de stages font défaut. Pierre Perrochon se prononce en faveur d’un numerus clausus : « Tous les ans, des étudiants m’appellent, catastrophés, car ils n’en n’ont pas trouvé et ne peuvent donc pas valider leur diplôme ».

Protéger le terme « nutritionniste »

 Si certaines incohérences en matière de formation sont mises en lumière par l’AFDN, c’est aussi parce qu’une injustice liée au titre est ressentie par l’association.

« Nutritionniste est un terme autorisé par la loi mais qui n’est pas protégé – contrairement au titre de diététicien, ndlr– , donc n’importe quelle personne peut l’utiliser »,explique M. Grodard.

« Prenez l’exemple des coachs nutritionnistes qui fleurissent un peu partout. Cela peut s’avérer dangereux dans la compréhension pour le grand public », précise M. Perochon. Il faudrait, selon ce diététicien, que le qualificatif de nutritionniste ne soit utilisé que par des professionnels titulaires d’une formation diplômante reconnue par l’État ayant trait à la nutrition. 

                                                                                                                         Flavie Peribois

 

Depuis Janvier 2007, le diététicien est reconnu comme professionnel de santé à part entière
Au 1eJanvier 2018 il y avait 12 440 diététiciens en France. 60% de ces derniers ont moins de 40 ans.

41% des diététiciens exercent en milieu hospitalier, 37%, en libéral et 22% en  restauration collective et dans l’industrie agro-alimentaire.

A l’hôpital, le professionnel de santé agit sur prescription médicale auprès du patient et participe à son éducation nutritionnelle ainsi qu’à celle de son entourage. Il assure la formation du personnel soignant et vérifie la prestation alimentaire globale de l’établissement.

En libéral, il réalise des consultations thérapeutiques et de prévention. Dans le milieu de la restauration collective et de l’industrie, en s’attachant à suivre la législation, il élabore des cahiers des charges, vérifie la qualité nutritionnelle des produits. Le diététicien joue aussi un rôle dans la recherche et dans la communication, réalisant ainsi une véritable mission de santé publique.

« Le diététicien peut se saisir de projets hospitaliers de recherche paramédicaux (PHRIP) et être ainsi à l’origine de véritables projets de recherche. Cela l’installe dans un rôle d’expert qui peut servir ensuite à l’ensemble de la profession »rapporte ainsi M. Ghislain Grodard

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