Numéro de prévention du suicide : des infirmiers au bout du fil

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Au bout du 31 14, le numéro national de prévention du suicide ouvert le 1er octobre 2021, ce sont majoritairement des infirmiers qui répondent. Les centres téléphoniques régionaux qui  ouvrent peu à peu recrutent des IDE (et des psychologues) pour permettre à ce nouvel élément de la stratégie nationale de prévention du suicide de se déployer complètement.

Numéro de prévention du suicide : des infirmiers au bout du fil

© Juice Dash / ShutterStock

Les personnes qui composent le 31 14, le numéro national de prévention du suicide (2NPS), tombent pour la grande majorité d'entre eux sur un infirmier ou une infirmière.

Les autres, dans une proportion bien inférieure, sur un ou une psychologue. Les recrutements de répondants pour cette nouvelle ligne ont commencé à l'automne et se poursuivent encore car seule une partie des centres téléphoniques ont ouvert, explique Christophe Debien, psychiatre au CHU de Lille et chargé du déploiement du 2NPS.

A Angers, Bordeaux, Brest, Lille, Lyon, Montpellier, Nancy, Poitiers, Rouen et Saint-Etienne, les équipes sont en place ou en cours de constitution et les IDE et psychologues répondent déjà aux appels (de toute la France).

D'autres doivent encore ouvrir puisqu'un centre par région doit être opérationnel. Ceux qui assurent une permanence 24 heures sur 24 ont besoin de 18 ETP (Équivalent temps plein) et ceux qui ne répondent aux appels que de 9h à 21h en ont besoin de huit en moyenne.

Il s'agit de postes à plein temps : combiner ces missions à temps partiels avec un autre mode d'exercice hospitalier est actuellement compliqué.

Un centre par région

Les infirmiers et psychologues recrutés ont pour mission de répondre aux appels téléphoniques (ou par chat) des personnes qui appellent le numéro national, des personnes en grande souffrance, parfois en crise suicidaire, ou des proches de ces personnes.

Ils doivent évaluer l'urgence suicidaire et adapter leur réponse, c'est-à-dire, par exemple, orienter la personne vers les structures de soin ou des ressources d'aide locales voire lancer une intervention dans les situations les plus graves.

Pour Christophe Debien, ces missions ne nécessitent pas forcément d'être « qualifié en psychiatrie ». Selon lui, « la première qualité requise, c'est l'empathie, la capacité à se représenter la souffrance de l'autre, sans jugement, pour essayer de la comprendre et de la mettre en équation avec ses problématiques, ce que la personne  n'arrive plus à faire car elle est submergée par son émotion et sa douleur ».

Il faut également des qualités de soignant en matière d'évaluation du risque suicidaire, de la souffrance de l'autre et du contexte : il ne s'agit pas de rassurer ou de consoler mais bien d'évaluer la situation pour y apporter la réponse la plus juste.

Des compétences en gestion de crise sont aussi très utiles pour ces postes : « une fois que la situation est évaluée, il faut trouver comment co-construire avec la personne les leviers qui, on l'espère, vont fonctionner » pour l'aider à sortir de la crise et trouver du soutien, ajoute le psychiatre.

Cela nécessite de la souplesse voire de la créativité, pour « s'autoriser à penser hors des cadres », poursuit-il.

Soin à distance, nouveau métier

Tous les infirmiers (et psychologues) recrutés, suivent une formation de trois jours avant de devenir « répondants ».

Elle a été élaborée « de manière très rigoureuse en collaboration avec le Groupement d'étude et de prévention du suicide, déjà chargé par le ministère de la Santé des formations en prévention du suicide », précise Christophe Debien.

L'équipe formation du pôle national chargé du déploiement du numéro, qui l'a conçue, a écrit un guide de bonnes pratiques inédit, après avoir réalisé une revue de la littérature sur le sujet, animé un focus groupe et soumis ce travail à un comité d'experts.

Les modules de formation ont été construits à partir de ce guide et les formations, en présentiel, se déroulent dans les régions. En plus, les répondants recrutés se forment à la réponse et à l'entretien téléphonique auprès de soignants plus expérimentés, notamment au sein des équipes du dispositif Vigilans de prévention de la récidive du suicide. Et ils bénéficient du tutorat de ces « vigilanseurs ».

Répondre à des personnes en souffrance psychique n'est pas anodin et une séance hebdomadaire d'échange de pratiques est organisée dans toutes les équipes, indique le psychiatre. Elle vise, selon lui, à permettre aux répondants de partager leurs expériences, aux moins expérimentés de bénéficier de celle des plus aguerris, et elle offre à tous un espace pour déposer les émotions et les situations difficiles qui peuvent être ressenties et vécues.

Ces « répondants-soignants » sont en quelque sorte, selon lui, des pionniers d'un « nouveau métier » des soins à distance, en cours de création depuis la création du dispositif Vigilans en 2015 et dont la crise du Covid a démontré à quel point ils sont utiles. Pour Christophe Debien, « c'est une belle aventure qui commence ».

Géraldine Langlois

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