Covid-19 : ces anciens soignants qui ont repris du service

Les infirmiers sont nombreux à être venus en renfort pour participer à la prise en charge des patients atteints du Covid-19 dans les centres hospitaliers. Pourtant, pour certains, les soins étaient derrière eux. Qu’est-ce qui les a motivé à rempiler le temps de la crise sanitaire pour prêter main forte à leurs confrères ?

Covid-19 : ces anciens soignants qui ont repris du service

photo d'illustration © M.Surbled / ActuSoins.

« J’ai exercé en réanimation polyvalente à l’hôpital de Rangueil (Toulouse) pendant douze ans, raconte Guillaume Decormeille. Puis, en février 2019, je me suis mis en disponibilité pour écrire ma thèse. Dans le cadre de la convention Cifre1, j’ai été embauché par Sim For Health, une entreprise qui propose des solutions virtuelles pour la formation des étudiants en soins infirmiers. »

Au moment de la crise, lorsque le confinement est annoncé, le directeur de Guillaume l’informe qu’à compter de la semaine suivante, il est en télétravail. « Je lui ai alors demandé son positionnement si jamais l’hôpital me demandait de réintégrer le service, rapporte Guillaume. Il m’a répondu que ma thèse serait mise en suspens pour que je puisse me rendre disponible. »

C’est donc avec le soutien de son directeur que Guillaume informe ses anciens cadres de sa disponibilité. « Une semaine et demie plus tard, j’ai été contacté pour réintégrer le service », souligne-t-il.

De son côté, Camille Joanes, ancienne infirmière en réanimation à l’hôpital de Rangueil, a quitté le service il y a deux ans pour reprendre ses études et commencer un travail de recherche en épidémiologie. « Lorsque la crise a éclaté, mon ancienne casquette de soignante et le sentiment d’utilité ont primé, explique-t-elle. J’ai alors contacté l’hôpital pour offrir mon aide. »

C’est uniquement lorsque la situation est devenue critique, que les cadres du service lui ont proposé de le réintégrer. Jusqu’à présent, elle n’a repris que pour une seule nuit à l’hôpital, son planning étant revu au jour le jour en fonction des besoins.

Arnaud Georges, a longtemps été infirmier aux urgences et au Smur, avant de devenir faisant-fonction cadre. En 2018, alors qu’il suit une formation à l’Institut de formation des cadres de santé, il est contacté par le maire de Cavalaire-sur-mer (Provence-Alpes-Côte d’Azur) pour lui proposer de devenir son directeur de cabinet. « J’ai toujours été intéressé par la politique, j’ai donc accepté son offre, rapporte-t-il. J’ai quitté l’hôpital pour saisir cette opportunité et non parce que je voulais partir. »

C’est à l’écoute du discours d’Emmanuel Macron, le 16 mars, qu’Arnaud décide de contacter trois hôpitaux pour leur proposer son aide quel que soit le poste. « J’ai simplement demandé un poste de nuit et les weekends pour que je puisse continuer mon travail de directeur de cabinet, précise-t-il. L’hôpital de Grasse m’a proposé 30 minutes plus tard un poste d’encadrement de nuit. »

Se réapproprier les gestes

A Grasse, l’ensemble de l’hôpital est réorganisé pour la prise en charge des patients Covid-19. « Dès que j’ai su que j’allais prendre ce poste, j’ai visionné les tutoriels sur le respect des conditions d’hygiène, même si, en tant qu’infirmier, nous connaissons les techniques », raconte Arnaud.

Et de poursuivre : « J’ai surtout beaucoup travaillé sur les procédures en lien avec les décès des patients touchés par le Covid-19, le circuit des patients, les prises en charges dédiées et le rôle de chacun afin de remplir au mieux mon rôle de référent. »

Avant de réintégrer le service, Camille a, elle aussi, suivi les formations et les tutoriels mis en ligne par le CHU de Toulouse pour le respect des bonnes pratiques. « Cela m’a permis de faire une mise à jour car je n’avais plus exercé en réanimation depuis deux ans », rapporte-t-elle.

Au sein du service, elle a aussi bénéficié d’une formation pratique pour les gestes d’hygiène et l’habillage, lui permettant de se mettre en confiance pour réintégrer les soins.

Guillaume a suivi la même démarche. Et, le premier jour, par conscience professionnelle, « j’ai demandé à un collègue si ma pratique était bonne et si je n’avais pas commis de faute d’hygiène, indique l’infirmier. J’étais ainsi sûr d’être apte à reprendre. »

Quel ressenti ?

« C’est très stimulant de retourner dans le service, de retrouver ce contact avec les soins critiques, d’exercer de nouveau aux côtés de mes anciens collègues et d’être présent en support, admet Guillaume. En revanche, le rythme est éprouvant et contraint par l’habillage et les protections individuelles. »

Pour Camille, la difficulté s’est davantage ressentie en amont, « car je continue mon activité doctorale en attendant d’être contactée par le service et le fait de passer d’un monde à l’autre est difficile mentalement, analyse-t-elle. Les deux univers sont liés par la santé mais la dichotomie est assez forte. Aujourd’hui, j’ai fait ce choix d’être volontaire par sentiment de solidarité et d’utilité. Mais cela m’a aussi permis de confirmer que ce que j’aime, c’est la recherche ! »

De son côté, Arnaud Georges reconnaît qu’en retournant à l’hôpital, le sentiment premier qui lui est apparu est d’être parfaitement utile et dans son élément. « Reprendre un poste à l’hôpital en cette période me semblait incontournable, sinon je l’aurais très mal vécu, confie-t-il. Cela met en exergue que j’aime toujours les soins, cela fait partie de moi, tout comme les fonctions d’encadrement. Je suis soignant et je le resterai. »

Laure Martin

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