Tralelho : un traducteur universel pour briser la barrière de la langue dans les hôpitaux

Une infirmière d'un service d'urgences a conçu et développé, seule, un site qui permet de traduire 50 phrases essentielles dans la prise en charge des patients dans les langues parlées dans 195 pays. Un outil aussi simple qu'essentiel pour les soignants qui prennent en charge des patients étrangers.

Tralelho : un traducteur universel pour briser la barrière de la langue dans les hôpitaux

capture d'écran, site Tralelho

Marion Verdaguer, infirmière d'accueil la nuit aux urgences du CHU de Rennes, était confrontée comme ses collègues à des difficultés de communication avec les patients ne parlant pas français. « On perdait beaucoup de temps dans le diagnostic car on avait du mal à poser les bonnes questions, à avoir les réponses, se rappelle-t-elle. On faisait souvent à ces patients plus d'examens qu'aux autres. Ils étaient aussi très mal à l'aise » du fait de l'impossibilité de se comprendre et de se faire comprendre.

Le jour, les soignants peuvent théoriquement faire appel à des traducteurs mais bien peu sont disponibles la nuit. A l'accueil, l'infirmière utilisait donc sur son ordinateur un traducteur en ligne (les traducteurs spécialisés ne comptent que 10 à 20 langues maximum). Elle tapait toujours à peu près les mêmes phrases. « Ça prenait un temps fou et j'étais parfois complètement perdue », ajoute-t-elle. Alors elle a cherché des solutions. Pour elle qui a déjà codé, l'idée d'un site web semble la plus facile à mettre en œuvre et à utiliser.

195 langues

Véronique Verdaguer, infirmière a développé le site Traleho

Marion Verdaguer a développé le site Traleho, qui permet de traduite 50 phrases essentielles dans la prise en charge des patients.  © DR

Marion Verdaguer a commencé en septembre 2015 à coder le site et à compiler une cinquantaine de phrases essentielles, celles dont elle avait besoin mais aussi celles d'autres collègues, soignants ou médecins. « J'ai ensuite cherché sur les forums en ligne des personnes francophones mais de langue maternelle étrangère et je leur ai demandé s'ils voulaient bien traduire ces phrases », raconte l'infirmière.

Petit à petit elle a coché les cases à côté des pays de la liste de l'ONU (certains ont plusieurs langues officielles mais certaines langues sont communes à plusieurs pays). En avril 2016, 60% des pays étaient pourvus en traductions et le site Tralelho (Traductions pour les étrangers à l'hôpital) a pu être mis en ligne. Aujourd'hui, il couvre aujourd'hui les langues et dialectes parlés dans 195 pays... « Il ne manque que le turkmène, le groenlandais, la langue du Timor oriental (le tétoum, NDLR) et certains dialectes africains », remarque l'infirmière, qui a renoncé à trouver des traducteurs.

Le site est d'un usage très facile. Il suffit que le patient clique sur son continent d'origine puis sur le drapeau de son pays. Le soignant peut ensuite cliquer sur l'une ou l'autre des 50 phrases proposées, qui est automatiquement traduite, s'affiche sur le site dans l'alphabet correspondant et peut donc être lue par le patient.

Les questions sont réparties par thème : circonstances, douleur, neurologie, respiratoire, circulatoire, malaise, digestif, antécédents... Des questions assez fermées (« Où avez-vous mal ? », « Ressentez-vous des palpitations ? »...) afin de favoriser des réponses précises. Les traductions ont été vérifiées. En 2017, « j'ai ajouté des fiches spécialisées (téléchargeables, NDLR), poursuit Marion Verdaguer, pour la radiologie et la pédiatrie puis pour l'anesthésie, le bloc opératoire et les secrétariats. » Le site permet aussi à ses utilisateurs d'utiliser un traducteur automatique de texte libre.

50 questions, 8 thèmes

« Je me sers du site quasiment tous les soirs », observe l'infirmière, toujours unique responsable du site. Bénévole sur ce projet, elle veut absolument qu'il reste gratuit et sans publicité (mais on peut contribuer via Paypal), et donc facilement accessible. Il se fait peu à peu connaître. Le service communication du CHU l'épaule dans cette démarche. Le label « Droits des usagers de la santé » décerné au projet en 2017 par l'ARS de Bretagne y a contribué aussi.

Géraldine Langlois

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