Loi Santé : les aides-soignantes et auxiliaires de vie pourront effectuer des actes infirmiers ?

Loi Santé : les aides-soignantes et auxiliaires de vie pourront effectuer des actes infirmiers ?

Une nouvelle mesure du projet de loi santé devrait attiser une nouvelle fois la colère des infirmiers et des infirmières. En confiant des actes techniques réservés aux infirmiers à des aides-soignantes ou des auxiliaires de vie dans les établissements médico-sociaux, cet amendement remet en cause le décret de compétences des infirmiers. 

Loi Santé : les aides-soignantes et auxiliaires de vie pourront effectuer des actes infirmiers ?Actualisation (10 avril) : l’article 30bis n’a pas été adopté par les députés

Actualisation (2 avril 2015) Un amendement déposé à l’initiative de l’Ordre infirmier vise la suppression du nouvel article 30 bis du projet de loi. “Des contacts ont été engagés avec le Ministère et les groupes politiques depuis le vote du texte par la Commission des affaires sociales, afin d’expliquer les dangers d’une telle mesure”, indique l’Ordre infirmier. Ainsi quatre amendements déposés par le groupe UDI, celui des radicaux de gauche, Claude Greff (député UMP, ancienne infirmière) et Valérie Boyer (député UMP) visent la suppression de cet article 30 bis et devraient passer en séance plénière à l’Assemblée nationale la semaine prochaine.

Cette nouvelle mesure est prévue dans un amendement de cinq députés et figure dans un nouvel article 30 bis* du projet de loi Santé, étudié aujourd’hui même et jusqu’au 14 avril à l’Assemblée Nationale.

Cet amendement vise “à permettre à des professionnels salariés non soignants de réaliser des actes tels que l’administration de valium en cas de crise d’épilepsie convulsive chez une personne handicapée ou encore des aspirations trachéales ou des nutritions par gastrotomie”, expliquent ses auteurs.

A l’annonce de ce nouveau coup de théâtre, les syndicats ont vivement réagi.  Contactée par téléphone, Isabelle Eudes, de la FNI s’est indignée.

Comment voulez-vous que dans un EHPAD, par exemple, des aides-soignantes, déjà surchargées de travail soient en mesure d’effectuer des tâches pour lesquelles elles n’ont même pas les compétences. C’est gravissime“.” Les personnes les plus fragiles, personnes âgées et handicapées encourent un risque majeur pour leur sécurité“.

Cette mesure du projet de loi de santé sonne “le glas du métier d’infirmière”, explique la FNI dans un communiqué.

Aujourd’hui, seule une infirmière diplômée d’Etat est habilitée à intervenir auprès d’un patient pour réaliser toute une série d’actes techniques (injections, perfusions, réalisation et surveillance de pansements spécifiques, pose de sonde, soins de bouche, prise de sang, soins palliatifs…). En confiant ces actes aux seules infirmières, les pouvoirs publics entendaient jusqu’à présent garantir la sécurité des soins par des professionnels titulaires d’un diplôme d’Etat après 3 ans d’études. Ce n’est plus le cas.”

Si cette mesure est adoptée, tout aide-soignant ou auxiliaire de vie, pourra accomplir des actes réservés aux infirmières.

Ce danger concerne notamment les personnes admises en Service de Soins Infirmiers À Domicile (Ssiad), structures qui comme leur nom ne l’indique pas, emploient des aides-soignants pour les toilettes et font aujourd’hui appel à des infirmières libérales pour les soins infirmiers, mais  aussi les personnes hébergées en maison de retraite médicalisée (Ehpad) ou dans les établissements pour personnes handicapées” explique la FNI.

Il n’est pas question de tolérer le démantèlement du décret de compétence de notre profession et encore moins de son rôle Propre. Comment les pouvoirs publics peuvent-ils croire que nous laisserons brader la profession d’infirmière tant appréciée des français” s’insurge de son côté le syndicat Convergence Infirmière.

Le soin infirmier assimilé au seul acte, tel qu’il est décrit dans cet article 30 bis est très réducteur. Cet article humilie toute la profession d’infirmière dont visiblement vous ne connaissez pas le rôle” écrit le syndicat dans un communiqué, s’adressant directement à Marisol Touraine.

A suivre de très près…

Rédaction ActuSoins

*L’article 30 bis du projet de loi santé dispose que : « L’article L. 313-26 du code de l’action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Un décret précise les conditions dans lesquelles les actes de soins infirmiers peuvent être délégués à des professionnels des établissements et services médico-sociaux mentionnés à l’article L. 312-1. »

Exposé des motifs : La présence de médecins ou d’infirmiers dans les établissements médico-sociaux n’est pas toujours systématique. Aussi, les structures médico-sociales peuvent être amenées à demander une réorientation vers une autre réponse à la survenue d’une pathologie nécessitant des soins infirmiers par exemple. (…) L’objectif doit être d’accroître la capacité de tous à porter dans la durée des situations plus lourdes, par une montée en compétences et savoir-faire internes. (…)Le présent amendement vise à permettre à des professionnels salariés non soignants de réaliser des actes tels que l’administration de valium en cas de crise d’épilepsie convulsive chez une personne handicapée ou encore des aspirations trachéales ou des nutritions par gastrotomie et de garantir la réalisation des soins nécessaires à la qualité de vie dans les meilleures conditions possibles. Néanmoins, ces actes restent des actes de soin dont la réalisation est chaque fois que possible effectuée par un personnel soignant, cependant sa réalisation peut être déléguée par un médecin à tout personnel salarié de l’établissement sous condition : d’une formation adaptée et régulièrement actualisée ; d’une information spécifique sur la procédure et ses conditions d’utilisation.

Le Sniil, membre du tout nouveau Collège Infirmier Français compte oeuvrer pour qu’un amendement de suppression de cet article 30 bis soit déposé à l’Assemblée Nationale. Cet article “revient, au final, à permettre à des auxiliaires de vie sociale dont 79% ne sont titulaires d’aucun diplôme de procéder à des actes invasifs et/ou d’administration de substances vénéneuses… Et que tout ceci pourra s’effectuer en dehors de tout contrôle de professionnels de santé puisqu’une présence d’infirmière n’est pas obligatoire ni automatique dans certains des établissements et services médico-sociaux mentionnés à l’article L. 312-1 (ceux précisés dans l’article 30 bis)”, s’offusque le SNIIL.