Erreur d’une étudiante infirmière : des conditions de travail, un encadrement à revoir (Tribune)

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Le décès d’un patient, au sein du service d’oncologie de l’institut Bergonié à Bordeaux suite à l’injection par erreur d’un produit médicamenteux par une étudiante infirmière, pose la question de l’encadrement des étudiants infirmiers au sein des services de soins.

Erreur d'une étudiante infirmière : des conditions de travail, un encadrement à revoirIl s’agit avant tout d’un drame pour la famille à laquelle nous pensons. Mais plus largement, et afin que de telles circonstances ne se reproduisent, nos pensées et réflexions vont aussi à cette étudiante infirmière.

Cette dernière ne doit pas en effet être l’unique responsable facilement trouvée d’une affaire révélatrice de dysfonctionnements systémiques. Les conditions de travail des équipes soignantes deviennent aujourd’hui source d’erreurs.

A l’heure où les équipes expriment de plus en plus de difficultés à exercer leur activité au quotidien (effectifs réduits, recours aux intérimaires, regroupement et mutualisation de services,…), la question posée est aussi celle de la qualité de l’encadrement offert aux étudiants sur le terrain : comment peut-on encadrer correctement les étudiants infirmiers lorsque l’on est déjà en difficulté pour prendre en charge nos patients ?

L’efficience rend les conditions de travail de plus en plus difficiles. La diminution des effectifs paramédicaux, touchant ainsi le principe des ratios patients/soignants, augmente de plus en plus le risque d’erreur médicale. Les équipes sont mises sous pression et c’est donc souvent que ces dernières prennent leurs postes avec la peur au ventre.

Beaucoup de soignants avouent avoir changer leurs pratiques de soins . les récentes études sur l’épuisement professionnel (burn-out) inquiètent la communauté et chacun se demande de quoi sera fait l’avenir notre métier.

Stress, burn-out,...

Ce contexte stressant impacte la qualité et la sécurité des soins et de plus en plus de soignants alertent sur leur quotidien professionnel sans que peut autant des mesures correctrices soit menées.

Les actions politiques sont décevantes et ne font que détruire méthodiquement notre système de santé, que ce soit lors de la fermeture de services ou de regroupement d’établissements contre toute logique sanitaire, créant ainsi des usines à malades, corrélées à une diminution des effectifs.

La généralisation quasi idéologique de l’hospitalisation de jour ou ambulatoire réduit considérablement le temps patients-soignants, provoquant ainsi des erreurs de jugement du fait de l’obligation de rapidité dans la réalisation des soins.

Alors comment envisager en plus d’encadrer et former correctement notre relève infirmière alors que le quotidien est devenu si difficile ?

La nouvelle réforme des études n’arrivent pas à convaincre les actuels professionnels de santé, les terrains de stage sont de plus en plus sollicités pour apporter un maximum de connaissances aux étudiants en un minimum de temps et d’effectifs.

La conséquence est la dégradation de l’enseignement de terrain avec des répercussions sur les futurs professionnels et les patients. Le métier d’infirmier est déjà peu attractif par les conditions salariales et la pénibilité (1 week-end sur deux,…) ; il le sera encore moins avec la dégradation des conditions de travail et la responsabilité.

L’enquête en cours au delà de rendre des conclusions sur ce qu’il s’est passé doit aussi mettre en exergue les problématiques d’organisation de travail. Les responsables administratifs doivent eux aussi répondre de la désorganisation des soins.

L’erreur ou la faute professionnelle ne doivent plus être mises sur le dos du soignant quand les structures hospitalières n’offrent plus les conditions de sécurité nécessaires aux pratiques soignantes.

La vrai responsable du drame de Bordeaux n’est pas notre collègue élève-infirmière mais l’institution dans son ensemble.

Guillaume Gandoin, Infirmier urgentiste

A relire :

L’erreur d’une étudiante infirmière provoque le décès d’un patient

 

Les dernières informations (avec Metronews)

S’il est encore trop tôt pour connaître les circonstances exactes de cette erreur médicale, les investigations ont déjà permis de déterminer que "le patient, récemment hospitalisé en soins palliatifs, s’est vu administré par erreur en intraveineuse directe cette dose de potassium qui aurait dû être administrée à un autre patient qui se trouvait dans une autre chambre", a expliqué le procureur Marie-Madeleine Alliot qui a ouvert une information judiciaire pour homicide contre X.

La victime devait recevoir, elle, une injection de corticoïdes.Selon la procureure, deux seringues se trouvaient à disposition de l'infirmière lors de l'injection. "L'emballage (du produit) était étiqueté, mais pas la seringue", a-t-elle précisé, évoquant une "erreur d'inattention, une imprudence". L'étudiante infirmière se serait trompée au moment de prendre la seringue pour l'injection. "

Malheureusement comme on le voit la séparation dans les offices est insuffisante puisqu’il y a eu cette interversion de médicaments. Il y a des strates de vérification (…) mais, on voit qu’il y a eu une faille", a souligné Emmanuel Bussières, chirurgien et directeur de la politique médicale de l'institut Bergonié.

 

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Réactions

32 réponses pour “Erreur d’une étudiante infirmière : des conditions de travail, un encadrement à revoir (Tribune)”

  1. Marie Alix dit :

    Urgentiste est une spécialité médicale tout comme Dermatologue ou Urologue, donc l’appellation « infirmier urgentiste » est la manifestation d’une frustration refoulée d’un infirmier qui a sûrement du faire deux P1 sans réussir…

    N’ayons pas honte de notre métier et signons par notre véritable appellation: INFIRMIER

    • sancho dit :

      Bonjour,

      Ou tous simplement c’est un infirmier qui estime comme beaucoup que pour travailler efficacement dans certains services une spécialité infirmière est nécessaire à l’instar des spécialités médicales et à l’instar des infirmiers de nombreux pays. (Les urgences, la réanimation, la cancérologie, et surement bien d’autres, …)

      Mais effectivement c’est loin d’être le plus important dans cet article.

      Cordialement

  2. Vous êtes mauvaises langues… « Infirmier urgentiste » c est un inf qui est fan de la série, je vois que ça…

  3. Aurelie Blanc dit :

    Alors cela à été jugé ?

  4. Au delà de l’article, au demeurant sensé, se révèle, par la pseudo polémique qui s’est constitué autour de l’appellation « urgentiste », la bêtise ambiante des requins prêt à se précipiter sur un point de détail pour se gausser et moraliser à tout va. Qu’est ce qu’on en a à cirer de la signature ? Outre qu’elle peut éventuellement apporter un détail sur la provenance de l’infirmier. Le sujet est tout autre, et d’autant plus important. Je suis infirmier, et cette état d’esprit me fait honte.

  5. Et ce mr ne se fait pas appeler infirmier urgentiste…c est le journaliste qui l appelle comme ca….et jcrois pas que ce soit le fond du pb….infirmier psychiatrique infirmier urgentiste…etc….juste pr notifier la specialite…et alors??…moi jsuis liberale…mdr…et jl assume….pffff y a des frustres qd mm….

  6. Tout est dit et je valide a 400%!!!

  7. Aline Barra dit :

    Très souvent une erreur médicale relève d’un dysfonctionnement et je précise « très souvent » et pas tout le temps, elle doit permettre de mettre tout le monde face à ses responsabilisés, d’y réfléchir, de mettre en place des actions et ainsi éviter que l’erreur ne se reproduise. Ca c’est dans l’absolu ensuite ce que décrit cet infirmier est aussi la réalité et il faut l’entendre même si le procès est en attente. C’est son point de vue et il le dit. Ou est le problème ??? Ah oui j’oubliais la polémique sur son titre !!! Quelle importance ca a pour certains étonnant. Lors de mes études j’ai connu des services de soin débordés ou les IDE n’avait pas « le temps » d’encadre les étudiants et ce malgré eux je ne pense pas être la seule ?? Bonne journée à vous toutes et tous IDE

  8. Chris Carmona dit :

    Merci qui? merci la nouvelle réforme !!!!!!!!

    • Double Mu dit :

      Votre commentaire est particulièrement déplacé vis à vis de la situation, vu qu’elle évolue au cours de l’enquête.

      Selon la conférence de presse de la procureur de Bordeaux (1), et je cite :

      « L’injection a été faite par une élève infirmière, accompagnée par une infirmière titulaire, en présence de la famille du patient admis en soins palliatifs (…).  » L’injection de chlorure de potassium était prévue pour un autre patient qui se trouvait dans une autre chambre(…). L’emballage était étiqueté, mais pas la seringue »

      Au stade de l’enquête on ne sait pas :
      – qui a préparé les seringues en question
      – pourquoi elles n’étaient pas étiquetées
      – pourquoi l’IDE n’a pas fait jeter les seringues non marquées

      L’élève n’était donc pas seule. On ne sait pas pourquoi le KCL était là (réelle erreur de thérapeutique, ou pour rajouter dans une poche de perf ?). Alors les conclusions hâtives sont assez malvenues…

      Quant à la mise au banc de la nouvelle réforme, cela commence à être particulièrement pénible. Nouvelle diplômée, je peux vous dire qu’aucune réforme ne protège d’un incident d’administration de thérapeutique et que les anciennes ne se distinguent pas plus que les autres en matière de respect des précautions dans ce domaine.

      Deux exemples rencontrés en stage (et il y en aurait d’autres)  :

      – Un incident est arrivé en service de cardiologie sur un test médicamenteux (je m’en étais tenu très loin en bonne étudiante que j’étais pour ne pas y être mêlée). La cadre avait proposé dans le cadre de la gestion des risques à l’équipe IDE une réunion, non pour blâmer l’IDE, mais pour réfléchir à la pratique, à la méthodologie, aux axes d’amélioration. Quand j’ai demandé à la cadre les conclusions de la réunion (parce que c’était un aspect qui m’intéressait justement cette gestion des risques), la cadre m’a répondu qu’elle n’avait et n’aurait pas lieu parce que la majorité des IDE de l’équipe avait répondu que « ça ne leur arriverait pas ». 20 ans de service.
      – Je me suis déjà faite engueulée en pleine salle de soin parce que je n’avais pas validé mes actes de soins (injections et médicaments IV) avant de partir les poser. Raison : «  ça fait perdre du temps, ça sert à rien de les faire après , on est déjà à la bourre ! ». 7 ans d’activité.

      Je passe les travaux sur l’amélioration des pratiques demandés à l’IFSI et où on m’a répondu « apprends à faire ton taff, tu critiqueras celui des autres après »…
      Je passe aussi sur les services où TOUS les jours en salle de repos j’ai entendu dire (comme de nombreux étudiants), « cette réforme c’est de la merde, ça forme que des incompétents, je leur confierai pas ma famille ». Le même service où j’ai entendu dire les IDE avec un petit sourire dire «  non mais de toute façon le nombre d’étudiants qui arrêtent après ce stage »… Oui 75%. Et aucune remise en question. C’est un peu comme si vous disiez à un patient avec une jambe en vrac tous les jours qu’il ne remarchera jamais… effectivement il ne remarchera pas. C’est la même chose pour un étudiant. Dites lui tous les jours qu’il est incompétent, il le deviendra.

      En fais-je une généralité comme vous ? Non… parce que j’ai eu aussi de supers encadrants, qui malgré des conditions de travail pénibles, en équipe réduite, avec des charges de boulot énorme, qui m’ont appris les choses comme il faut : valider les soins après les avoir fait, si on ne sait pas ce qu’il y a dans une poche de perf ou une seringue et bien on jette et on recommence, toujours vérifier les prescriptions, se battre contre les médecins qui mettent « 1 ampoule d’Acupan » parce qu’il faut un dosage précis même si le conditionnement est toujours le même, etc. J’ai trouvé des soignants qui m’ont évaluée pour ce que je faisais et non pour des a priori de formation. Et je les remercie tous les jours pour ça.

      Au passage, la FNESI a demandé que l’encadrement soit pris en compte dans la charge d’un service et a demandé la possibilité de formation des IDE dans les services à l’encadrement. Les étudiants pensent à vous aussi, parce qu’ils sont vos futurs collègues, qu’ils sont les premiers témoins des conditions de travail des IDE et de la difficulté à exercer ce métier. Mais je ne pense pas que beaucoup de soignants s’y intéressent ou militent pour que cela soit mis en place.
      Alors crachez sur la nouvelle réforme autant que vous voulez… mais ça n’arrangera rien. Et absolument pas le fond du problème.

      1. http://mobile.lemonde.fr/sante/article/2014/09/12/sante-information-judiciaire-apres-la-mort-d-un-patient-pour-une-erreur-d-intraveineuse_4486845_1651302.html

  9. …j’ai connu une élève infirmière il y a quelques année avec laquelle j’ai maintenant la chance de partager ma vie et ayant vu les rytmes que le « systeme » leur impose (semaines de stages, cours, petits boulots dan un autre service le WE … . c’est un miracle qu’il n’y ait pas davantage d’accidents … C’est un choix de société … Voulons nous optimiser les coûts ou la QUALITÉ des soins !

  10. Merci à ceux qui au delà de mon appellation ont aimé ma prise de position !

  11. Vous en supplie arrêté penser à toute la famille et l’étudiante qui êtes vous pour dire qui a tord ou raison vous voulez savoir Mon avis les tuteurs de l’étudiante sont aussi responsable alors même manquant de soignants les étudiants sont la pour apprendre mais non pour être vos larbins

  12. Elise Lilise dit :

    L encadrement des étudiants devient de plus en plus dur, j avoue avoir peur quand je les encadrent, une erreur est si vite arrivée. Je bosse dans un CHU en service d’oncologie thoracique , il y’a des lits de soins palliatifs, on manipule, morphine, hypno, ivse kcl( d ailleurs je n’ai jamais injecté du kcl en ivd…) et autres produits, le service est hyper lourds, 24 patients, des fins de vies, des prises en charges de familles, bcp de mouvements de patients( entres sorties) sur cela des décompensations régulières de nos très chers patients, plus la pec des Esi, franchement, je sais que je ne fais pas un encadrement de qualité. Je comprends ce que veut dire le gars, voir même je le vis, oui ok il se fait appeler infirmier urgentiste, mais bon le fond de son article reste pour moi d actualité, même si on ne sait pas effectivement.. Et pour finir quand on décortique une erreur médical, on remet souvent tout un système en cause…

  13. « infirmier urgentiste »….loooool

  14. En tout cas vive l’esprit de solidarité entre ide..!!…ça fait peur….c’est du chacun pour soi..dès qu’une faute est commise tt le monde se défausse et cherche UN coupable….la parole n’est jamais libre et tjrs jugée…c’est bien triste….

  15. bebertindy dit :

    En même temps on irait un peu manifester comme les IADE et les puéricultrices, on nous entendrait peut être un peu plus, car le gouvernement sait très bien que nous sommes un des métiers qui ne peut pas aller scander ses revendications dans la rue… Et ça ils en profitent très bien! Maintenant le problème de cette histoire est que ni l’étudiante, ni l’infirmière sont blâmables pour les raisons déjà citées, bien que la fatalité se soit produite. Mais qui n’a jamais fait d’erreur?!

  16. Axelle Poivre dit :

    On ne sait pas encore ce qu’il s’est passé….mauvais encadrement, problème de service, oh alors faute grave ( ne pas regarder ce que mon injecte …. Si si ça arrive et pourtant ça prend 10sec )
    Bref en tout cas cette histoire est triste pour tout le monde ….

  17. En tout cas cet infirmier travaillant dans un service d’urgences ou SAMU peut importe (vu que le terme urgentiste soulève tout une polémique) aura au moins soulever certaines difficultés de travailler aujourd’hui en tant qu’infirmier toutes spécialités confondues. Alors même si on ne sait pas les résultats de cette enquête il aura a moins eu le culot de d’écrire ce qu’il penses.
    Bref peut importe a qui ou a quoi est du la faute je souhaite bien du courage à cet ESI, aux infirmiers qui l’encadraient et surtout à la famille de ce pauvre patient

  18. Des soins palliatifs. ….du potassium en IV pour l autre chambre. ….des réflexions d un IDE urgentiste, ais je le droit de dire que RIEN n’est dit. …..

  19. Infirmier urgentiste ? c’est un nouveau D.E. ça ??? Et puis le mec il est fort, il en sait plus que tout le monde alors que la justice n’a pas fait son enquête encore. Il ne faut vraiment pas tout mélanger !

  20. Gwen Yvinec dit :

    Justement il est objectif ! Bien dit !! Il voit cela dans l’ensemble. Une erreur n’est jamais commise par hasard… Tant mieux pour ceux où leurs conditions de travail sont excellentes mais il ne faut pas oublier les autres… Cependant attendons les conclusions de l’enquête…

  21. Celine Venet dit :

    Tout est effectivement dit

  22. ce que j’aime c’est le lien sous-entendu par cet infirmier entre conditions de travail et erreur médicale d’une étudiante… l’enquête étant en cours, on ne sait pas encore quelles sont les raisons exactes… juste : une erreur peut survenir en dehors de problèmes organisationnels ou de mauvaises conditions de travail… on dirait l’article d’un syndicaliste qui récupère l’événement… vive l’OBJECTIVITE… et le pire, la dernière phrase ou l’auteur rend le jugement final : le coupable est l’institution »… non mais n’importe quoi…

  23. déjà va falloir arrêter de se faire appeler « infirmier urgentiste »…

    • Little_asa dit :

      Euh, s’il a eu une formation spécifique (SMUR) ou a un D.U. Soins infirmiers en médecine d’urgence, il peut se prétendre infirmier urgentiste oui; c’est dommage que vous n’ayez retenu que cela sur l’article…

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