Mesures transitoires au bloc opératoire : le décret tant attendu suscite craintes et colère

Mesures transitoires au bloc opératoire : le décret tant attendu suscite craintes et colère

Le nouveau décret tant attendu sur les mesures transitoires concernant les infirmiers non IBODE exerçant en bloc opératoire vient d'entrer en vigueur. Il prévoit qu'ils pourront réaliser tous les actes « exclusifs » aux Ibode après un an d'exercice au bloc et moyennant une courte formation. L'absence d'obligation de suivre la formation IBODE déçoit, voire révolte, leurs représentants.
© VesnaArt / ShutterStock

Un nouvel épisode du feuilleton sur les mesures transitoires pour les infirmiers travaillant dans les blocs opératoires et n’ayant pas suivi la formation Ibode vient de paraître avec la publication – attendue depuis de nombreux mois – du décret sur ce sujet au Journal officiel du 25 octobre.

Le texte est « connu depuis le 30 décembre 2021 », souligne l’Union nationale des associations d’infirmier(ère)s de bloc opératoire diplômé(e)s d’État (Unaibode) dans un communiqué.

À cette date, le conseil d’État a en effet annulé les décrets de 2019 et 2021 qui limitaient à trois les actes normalement exclusifs aux Ibode que les infirmiers exerçant dans les blocs et ayant suivi une courte formation complémentaire étaient autorisés à effectuer (aide l’exposition du patient, à l’hémostase et à l’aspiration).

Il avait demandé à la direction générale de l’offre de soins (DGOS), au ministère de la Santé, de ne pas limiter les actes en question et d’autoriser les IDE à les réaliser tous, toujours moyennant une formation. Il aura donc fallu plus de deux ans et demi pour arriver à ce nouveau décret… qui pourtant n’apporte rien de nouveau par rapport à ce que demandait le conseil d’État. Et pour cause : il est prêt depuis des mois.

Totalité des actes exclusifs

Le nouveau décret prévoit que les infirmiers non Ibode travaillant depuis plus d’un an en bloc opératoire peuvent réaliser les actes exclusifs aux Ibode à condition de détenir une autorisation préfectorale.

L’autorisation est temporaire pendant un an. Durant cette année, les IDE doivent suivre une formation ayant trait aux conditions de réalisation de ces actes, formation qui sera organisée par les écoles d’Ibode et dont la durée et le contenu seront précisés dans un arrêté.

L’employeur « permet à l’infirmier ou à l’infirmière, sur sa demande, de suivre la formation » en question, et il « en assure le financement », indique le décret.

Rien de nouveau sous le soleil, donc, par rapport à ce qui était prévisible, sauf que, justement les Ibode et leurs représentants auraient voulu bien autre chose.

Alors qu’une levée de boucliers a accompagné la parution du décret parmi les Ibode, l’Unaibode rappelle que l’association, comme celle des écoles d’Ibode (AEEIBO) et le Syndicat national des Ibode (Snibo), s’est battue contre ce texte.

L’Unaibode, par exemple, était au départ favorable à la limitation du nombre d’actes autorisés dans le cadre de ces mesures transitoires, et voulait que les autorisations délivrées soient uniquement temporaires et assorties d’une obligation de suivre la formation Ibode. Pour qu’au final les actes exclusifs ne soient effectivement réalisés que par des infirmiers de bloc opératoire diplômés d’État et ayant donc suivi les deux ans de formation, comme le prévoit le décret de 2015.

Même son de cloche du côté du Collectif Interblocs (CIB), intégré au conseil national profession (CNP) Ibode, qui  participe aussi au groupe de travail sur ces mesures. Le CIB, demandait également une obligation de formation pour les IDE concernées par les mesures transitoires et conteste avec véhémence tous les éléments du texte : l’année d’exercice en bloc requise, les délais pour obtenir les autorisations (31 décembre 2031 au plus tard), leur dimension définitive ou encore la facilité d’obtention des nouvelles autorisations par les IDE déjà autorisés à effectuer les trois premiers actes « exclusifs » délégués depuis 2019. Le collectif affirme que « la mort de [la] spécialité est définitivement enclenchée » avec ce décret.

Spécialité fragilisée

Tant que le nombre d’Ibode formés n’augmentera pas drastiquement – les freins sont multiples – des mesures transitoires sont inévitables, rappelle Magali Delhoste, présidente de l’Unaibode, « pour des raisons de santé publique, pour continuer de faire fonctionner les blocs ».

Mais « notre crainte, ajoute-t-elle, c’est que ces mesures perdurent dans le temps », puisque les autorisations pourront être définitives. « À nous de travailler pour montrer aux infirmières concernées par ces mesures la plus-value de la formation Ibode et aux établissements celle d’avoir des personnels formés et qualifiés », poursuit-elle.

Alors que certains points doivent encore être précisés par arrêté, ajoute la présidente de l’Union, « nous travaillons pour qu’y apparaisse un contrat d’engagement » qui conduise les IDE à suivre la formation d’Ibode et leurs employeurs à les financer, puisque c’est l’un des freins.

« Nous allons continuer de promouvoir la formation Ibode », martèle-t-elle. Par ailleurs, le chantier sur la nouvelle VAE se poursuit et le Snibo va continuer de demander une revalorisation salariale incitative pour les Ibode.

Le CIB, de son côté, promet d’attaquer le décret en justice et envisage une « action massive » pour défendre la profession d’Ibode.

Géraldine Langlois

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