Le soutien de Roselyne Bachelot à cette proposition de loi n’est pas une manifestation de mauvaise humeur, mais une posture politique parfaitement calculée en fonction du rapport de force des infirmiers vis à vis de leur instance ordinale. Car un fait demeure, cruellement factuel: plus de 85 % des infirmiers ne se sont pas inscrits à l’ordre et n’ont pas cotisés. L’argument des fichiers ADELI obsolètes n’explique rien: Depuis plusieurs mois, tout infirmier qui souhaite adhérer peut le faire facilement en téléchargeant le dossier d’inscription.
Parmi ces 85% combien sont profondément hostiles à l’existence d’un ordre, pour des raisons philosophiques ou sociales? Une minorité. Organisée, communicante, certes, mais une minorité tout de même. Combien refusent de payer 75 euros? La grande majorité.
Dès le début, l’Ordre a souhaité “se donner les moyens de son indépendance et de ses actions”, en choisissant de fonctionner avec un budget de 37 millions d’euros. L’argument d’une cotisation unique était dicté par une “impossibilité de moduler la cotisation”. Un amendement à la loi HPST a intégré cette possibilité. Arguant au début que cette disposition n’était pas rétroactive, l’ONI a peu de temps après considéré le contraire et diminué la cotisation de moitié pour les nouveaux diplômés. Trop tard, trop peu: Cette disposition n’a eu aucun effet.
En matière de cotisation, infirmiers salariés et libéraux sont inégaux devant l’impôt. Les infirmiers libéraux peuvent déduire cette cotisation en frais réels alors que l’immense majorité des salariés se contentent de l’abattement de 10%. L’ordre des masseurs kinésithérapeutes l’a compris et module sa cotisation en fonction de l’exercice. L’ordre infirmier a toujours refusé de le faire.
Une telle mesure, en entraînant une diminution substantielle du montant de la cotisation demandée aux salariés aurait considérablement compliqué la tâche des syndicats et des associations. L’ordre se serait progressivement installé dans le paysage et serait devenu en quelques années incontournable et totalement inamovible. Cette erreur stratégique, associé à une communication parfois malhabile et cassante se paie aujourd’hui au prix fort.
Thomas Duvernoy – Rédacteur en chef ActuSoins
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