Le contrat d’allocation d’études (CAE) est intéressant aussi bien pour les ESI Etudiants en soins infirmiers que pour répondre aux besoins d’infirmiers dans certains établissements de santé ou zones de France qui en manquent. Mais la FNESI souligne l’absence de règles nationales pour encadrer ce dispositif.
« Financièrement, je ne m’en sortais pas alors que je travaillais tous les week-ends, explique Nolan Gerbert, étudiant au sein de l’Institut de Formation en Soins Infirmiers (IFSI) de Compiègne, dans la région Hauts-de-France. En troisième année, ça allait devenir trop dur, j’ai donc opté pour le contrat d’allocation d’études (CAE). » Son CAE, Nolan Gerbert le fait au sein de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP).
Une « bourse d’étude »
Le CAE permet aux étudiants en soins infirmiers (ESI) de toucher chaque mois une somme d’argent durant leurs études, en échange d’un engagement à servir, une fois diplômé, au sein d’un établissement de santé. À l’AP-HP, les CAE proposés sont les suivants : 570 euros pour les ESI en deuxième année et 750 euros pour ceux en troisième année. Si l’allocation est versée pendant 12 mois, l’étudiant s’engage à exercer au sein de l’un des hôpitaux de l’AP-HP pendant 18 mois, une fois qu’il est diplômé. S’il en bénéficie durant 24 mois, il s’engage pour 30 mois. « C’est comme une bourse d’étude », résume Nolan Gerbert.
500 euros pendant 10 mois contre 20 mois d’engagement
Le CAE est proposé par de nombreux établissements dans toute la France. Depuis septembre dernier, le Centre Hospitalier des Pays de Morlaix, en Bretagne, en propose six aux ESI en dernière année.
Le montant est de 500 euros mensuels pendant 10 mois, contre un engagement de l’étudiant à venir travailler à l’hôpital, une fois diplômé, pendant 20 mois. « Le CAE nous permet d’améliorer la qualité de nos recrutements en ayant déjà une idée des profils de nos futurs infirmiers, explique Anastasia Capon, directrice des ressources humaines de l’hôpital de Morlaix. Un étudiant qui signe un CAE sera, par la suite, un jeune infirmier qui se projette comme futur professionnel au sein de notre hôpital. De plus, pendant les études, cela nous permet aussi de les suivre de manière plus individualisée car les étudiants qui ont eu le CAE cette année sont dans l’IFPS adossé à l’hôpital de Morlaix ou dans un autre IFPS mais souhaitent travailler sur le territoire morlaisien. On les retrouve donc généralement en stage au sein de nos services. »
La nécessité d’un cadrage national
On le voit donc, les conditions du CAE ne sont pas les mêmes à l’AP-HP et à l’hôpital de Morlaix. C’est justement l’un des problèmes majeurs pour la Fédération nationale des étudiant‧e‧s en sciences Infirmières (FNESI), qui réclame une uniformisation des règles du CAE au niveau national.
« Le versement peut se faire tous les mois pour certains CAE ou, au contraire à hauteur de 40 % du montant global à la signature puis 60 % à la fin de la formation, développe Pauline Bourdin, présidente de la FNESI. Dans certaines régions, les étudiants ont la possibilité de cumuler avec des aides sociales, alors que dans d’autres ce n’est pas possible. Les montants sont différents, la durée d’engagement n’est pas la même… Comme le CAE est proposé quasiment partout, il faut un cadrage national, c’est indispensable. De plus, les étudiants ne reçoivent pas toujours une information claire et loyale afin de prendre une décision libre et éclairée. »
Rembourser en cas de redoublement
Autre problème, en lien avec le précédent : l’absence de règles si un étudiant redouble. « Dans mon CAE, il est indiqué qu’en cas de redoublement – ou si je prolonge mes études -, le financement est arrêté mais le contrat n’est pas rompu, assure Nolan Gerbert. Concrètement, cela signifie que je n’ai plus de versement mais que je ne dois pas rembourser et que mon premier poste, même si la prise est repoussée, est garanti. » Mêmes conditions à Morlaix : la direction assure que la prise de poste est repoussée et que l’étudiant ne doit rien à l’hôpital.
Répondre au manque d’attractivité
Mais ce n’est pas le cas partout. « Avec certains CAE, si l’étudiant n’est pas diplômé dans les temps fixés par le contrat, il doit rembourser tout ce qui a été versé et n’a plus de poste à la sortie de ses études, indique Pauline Bourdin. La FNESI n’est pas favorable au CAE car ce dispositif profite de la précarité des étudiants pour combler des besoins liés au manque d’attractivité de certains établissements ou même de la profession en général. »
Un avis tranché sur un dispositif qui permet, c’est vrai, d’attirer de jeunes professionnels vers des hôpitaux ou zones qu’ils n’auraient peut-être pas choisis, comme premier emploi, sans le CAE. « Il est évident qu’il y a de la concurrence entre les hôpitaux pour attirer de jeunes professionnels de santé et que le CAE est l’un des outils », reconnaît Anastasia Capon qui estime que « dans le contexte actuel de précarisation des étudiants, il est important que l’hôpital prenne sa part et participe au financement de la formation des professionnels dont nous aurons besoin par la suite. »
Diane Cacciarella
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