Un infirmier crée une maison de santé… et déchante

Les maisons de santé, au cœur des évolutions actuelles de l’offre de soins primaires et des besoins de santé, nécessitent l’exercice coordonné entre différents professionnels. Cette transformation des pratiques professionnelles rime parfois avec désillusion.

Un infirmier crée une maison de santé... et déchante

©DR

Inaugurée le 18 septembre 2014, la maison de santé pluri-professionnelle des Allées à Corbeil-Essonnes a réalisé en un peu plus d’un an 180 000 consultations.

Avec 39 professionnels de santé (1), la MSP propose aussi un des plus grands projets français de périnatalité, selon son cofondateur, Damien Nicolini.

Certains professionnels sont joignables de 7 à 23h, pratiquent des tarifs opposables, dans un territoire d’Île-de-France récemment classé « zone fragilisée en offre de soins » selon l’agence régionale de santé.

Les financements en berne

Cependant, en dépit du succès auprès des patients, la structure est en proie à des difficultés. D’une part, il est difficile de faire évoluer les pratiques : « l’hôpital sud-francilien, avec lequel nous travaillons à la mise en place d’une convention, favorise l’hospitalisation à domicile. Difficile de leur proposer autre chose. », avance Damien Nicolini.

Et, alors que les autorités encouragent sur le papier le développement de telles structures, les financements manquent. Une pétition a été lancée, un courrier envoyé au médiateur de la République. « Nous souhaiterions que nos idées et solutions soient mieux considérées par l’ARS et la CPAM et qu’elles nous donnent les moyens de les appliquer », s'indigne Damien Nicolini, lassé d’innover sans soutien.

« Depuis deux ans, nous nous sommes inscrits dans l’évolution et la modernisation de notre profession, avec le souci d’offrir la meilleure des prises en charge, apportant des idées, des solutions, des services et des innovations le plus souvent bénévolement », détaille Damien Nicolini.

Ancien infirmier chez les sapeurs-pompiers de Paris, il n’envisage pas de revenir à l’hôpital ou à un exercice solitaire lorsqu’il quitte la brigade en 2006.

« J’ai fait quelques remplacements en libéral, et j’étais un peu perdu : j’avais l’habitude de travailler en équipe avec un médecin ambulancier, et tout d’un coup j’arrivais chez les gens sans savoir ce qu’ils avaient… » De fil en aiguille, un projet de « cabinet à plusieurs professionnels ayant à peu près les mêmes façons de travailler et de penser » mûrit jusqu’en 2012, où il entend parler du concept de maison de santé pluri-professionnelle.

La motivation du travail en coordination

Présentées comme une solution possible à la désertification médicale, les MSP doivent être constituées d’une équipe pluri-professionnelle et répondre à un cahier des charges national.

Damien Nicolini reconnaît que l’exercice permet de vaincre l’isolement et de mieux travailler en coordination : « Concrètement, lorsqu’on travaille avec les gens, on arrive à les mobiliser plus rapidement en cas de besoin. Idem avec les pharmaciens qui sont aujourd’hui membres du projet de santé et apportent une attention particulière à nos demandes. Sans compter le gain de temps, et l’accès rapide à une expertise".

"Pour les infirmiers, c’est très positif. Nous travaillons en lien direct avec tous les acteurs de la maison de santé et du territoire. Si la nouvelle loi de santé articule tout autour du médecin traitant, c’est bel et bien l’infirmier qui gère en grande partie la coordination », ajoute-t-il.

1) : dont 11 sages-femmes, 2 pédiatres, 1 gynécologue, 3 généralistes, 1 dermatologue, 5 orthophonistes, 4 kinésithérapeutes, 2 ostéopathes, 1 diététicienne, 1 psychologue, 1 ergothérapeute et 5 infirmiers.

Christelle Destombes

 Une association chapeau

 Damien Nicolini a également créé l’association Espace Vie en 2013, qui tend à regrouper les acteurs des soins primaires du territoire sud-francilien. Elle a pour objet de concevoir et animer l’exercice pluri-professionnel de professionnels de santé et de soins au sein des MSP, d’être l’interlocuteur professionnel auprès des institutions sanitaires, des collectivités, des partenaires, et de participer aux réflexions du territoire concernant la prise en charge et les besoins de santé. Son objectif : devenir une des premières communautés professionnelles au sens de l’article 14 de la future loi de santé.

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Réactions

11 réponses pour “Un infirmier crée une maison de santé… et déchante”

  1. Sueln-be dit :

    Française ayant travaillé 10 ans au CHU en Bourgogne, j’habite maintenant en Belgique. Après 3 ans en Clinique belge, je travaille désormais en Maison Médicale, organisme dont j’ignorais l’existence quand j’étais en France. C’est assez bien développé et surtout assez soutenu financièrement (jusqu’à maintenant, mais la rigueur du Gouvernement belge plane…). Cela n’empêche aucunement l’activité des infirmières libérales, avec qui nous collaborons et souhaitons garder un lien. Je découvre chaque jour les avantages de cette structure, les faiblesses aussi parfois, c’est une dynamique vraiment passionnante pour lutter autant que possible pour la solidarité et la justice à travers les soins. Bonne chance à tous ceux qui se lancent dans ce beau projet ! Pour plus d’infos, vous pouvez aller regarder sur le site de la Fédération des Maisons Médicales (l’historique et surtout la Charte).

  2. Sansebastien dit :

    Comme si les infirmières libérales ne faisaient pas tous les jours de la coordination avec les autres professionnels de santé!
    « J’ai fait quelques remplacements, et j’étais un peu perdu : j’avais l’habitude de travailler en équipe avec un médecin ambulancier, et tout d’un coup j’arrivais chez les gens sans savoir ce qu’ils avaient… »
    Bin oui mon gars, ça c’est ce que font les libéraux tous les jours, et ils n’ont pas besoin d’être chaperonné par un médecin…

  3. C’est dommage qu’il n’aie pas exercé à l’hôpital, on y apprend énormément de choses. C’est parfait ensuite pour la médecine de ville.

  4. Myriam Loison dit :

    C’est pas la prise en soin à domicile qui est remise en question, mais le statut de profession liberale des IDE.

  5. Est ce que travailler en msp signifie adieu le domicile ? Je ne crois pas il y aura toujours des patients à soigner à domicile

  6. Que cela convienne a certains, tant mieux. Je crains cependant la disparition de l activite liberale au profit de ces institutions…

  7. En Belgique C très pratiqué

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