Premier pas des internes dans le privé sous l’oeil sceptique du public

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Jusque là exclu­si­ve­ment for­més dans les hôpi­taux publics, les internes en méde­cine peuvent désor­mais choi­sir une cli­nique pour ache­ver leur cur­sus: une tren­taine d'entre eux ont ainsi fait leur ren­trée cette semaine dans des établis­se­ments pri­vés, mais cette inno­va­tion est regar­dée avec sus­pi­cion par les défen­seurs du ser­vice public.

Premier pas des internes dans le privé sous l'oeil sceptique du publicEnviron 450 équipes médi­cales du privé, selon la Fédération de l'Hospitalisation pri­vée (FHP), ont sou­haité sai­sir l'opportunité, ins­crite dans la loi HPST de 2009 réfor­mant l'hôpital, d'accueillir quelques-uns des 20.000 internes (dont 7.200 en pre­mière année).

Toutefois, seule une tren­taine a reçu l'agrément.

Adeline Cambon-Binder, en 4e année d'internat, est l'une de ces nou­velles recrues. Elle a choisi pour un semestre une cli­nique pari­sienne spé­cia­li­sée dans la chi­rur­gie de la main, domaine où "il y a très très peu de ter­rains de stage".

"Je ne ferai que regar­der et n'aurai pas léga­le­ment le droit d'opérer, mais je vais apprendre énor­mé­ment de choses (...) et obser­ver des inter­ven­tions réa­li­sées dans des volumes bien plus impor­tants qu'à l'hôpital", souligne-t-elle.

Un dis­po­si­tif accueilli avec prudence côté syndical

Pour l'ISNIH (Intersyndicat natio­nal des Internes des Hôpitaux), la for­ma­tion dans le privé peut limi­ter l'hyperspécialisation des CHU et "désen­gor­ger" les lieux de stage par­fois saturés.

"On sou­haite une ouver­ture pro­gres­sive et rai­son­née avec un bon enca­dre­ment, nous ne sommes pas là pour faire des rem­pla­ce­ments à bas coûts, et on espère aussi un peu d'émulation public/privé pour tirer vers le haut cer­tains stages", explique Jean-Christophe Faivre, secré­taire géné­ral de l'ISNIH.

De son côté, le syn­di­cat des internes des Hôpitaux de Paris réclame lui "un pro­jet péda­go­gique cohé­rent" et "la garan­tie que l'interne pourra effec­tuer l'ensemble des gestes techniques".

Pour le privé, une "vraie évolution, qui perturbe"

La FHP se veut donc ras­su­rante: "Dans le privé, l'interne sera le seul interne, accom­pa­gné d'un senior, et donc il appren­dra le métier et ne sera pas livré à lui-même. Il doit avoir la pos­si­bi­lité d'exercer", pré­cise ainsi son pré­sident, Jean-Loup Durousset.

"C'est une vraie évolu­tion, qui per­turbe c'est sûr –on a bien senti des freins en par­ti­cu­lier de cer­taines uni­ver­si­tés de médecine-, mais qui va dans le bon sens: une uni­ver­sité de tous, par tous et pour tous", plaide-t-il.

Contre-offensive du public

Pour le Pr Bernard Granger, repré­sen­tant le mou­ve­ment de Défense de l'Hôpital public, cet accès à la for­ma­tion tra­hit une démarche idéo­lo­gique: "L'OPA du privé sur toutes les mis­sions de ser­vice public."

"Cela peut être inté­res­sant dans la for­ma­tion d'avoir un contact avec le privé (...) mais il faut vrai­ment réser­ver cette pos­si­bi­lité à des cas excep­tion­nels", dit-il, sou­li­gnant les "dif­fé­rences entre l'hôpital public et ses mis­sions, dont l'enseignement, et les cli­niques commerciales".

"Il faut sur­tout faire très vite un bilan d'expérience pour voir si les stages sont for­ma­teurs (...) et si ça ne se fait pas au détri­ment des struc­tures publiques car les internes ont un rôle dans les soins qui n'est pas négli­geable", fait-il valoir.

Dès cette semaine, les hôpi­taux publics ont lancé un contre-feu: une cam­pagne de charme auprès des futurs méde­cins, qui valo­rise les pos­si­bi­li­tés de car­rière et les valeurs du public (sur 40.000 postes de pra­ti­ciens hos­pi­ta­liers, 10.000 ne trouvent pas preneurs).

"A l'hôpital, on ne gagne pas tou­jours moins bien sa vie que dans le privé, affirme Gérard Vincent de la Fédération hos­pi­ta­lière de France. Choisir l'hôpital c'est exer­cer un métier pas­sion­nant et ne pas se lais­ser enfer­mer dans une acti­vité de niche."

Anne-Sophie LABADIE - AFP

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Réactions

3 réponses pour “Premier pas des internes dans le privé sous l’oeil sceptique du public”

  1. SagaMG dit :

    Mouaip , toujours cette gueguerre public privé. Je me souviens avoir été aussi exploité à mort dans le public quand j’etais interne. Pendant 6 mois j’ai remplacé un poste de senior non pourvu. En 15 ans, les impératifs de productivité ont eu pour cause la réduction de l’encadrement effectif dans le public (les multiples casquettes des seniors au CHU aggravent les choses. c’est moins vrai en périphérique). L’augmentation de la durée de formation des internes de MG sur les dernières années, par exemple, a permis d’avoir 1 an de main d’oeuvre payées proche du smic et corvéable à merci (sous la menace du: tu la fermes ou on te valide pas …). On les a enfumé en leur expliquant que cette année de plus servirait à la valorisation du métier . Une fois thésé, le MG se voit limité des prescription de Rivotril comme s’il été un peu trop neuneu après ces 9 ans d’etudes…. Je ne vois pas, sauf idéologiquement et dogmatiquement, de différence entre les risques public privé pour nos internes. Le panachage a même du bon: voir la situation de 2 points de vue pour choisir selon ses affinités. Apprendre le coté commercial et la gestion d’une activité (considéré encore dogmatiquement comme SALE dans le public). Un medecin va gérer une entreprise s’il est libéral. Il est choquant qu’il ne mette pas plus les mains dans le moteur libéral durant ses études. L’ouverture au privé est donc une chose positive. A condition de bien définir les contours. Les syndicats sont souvent bloqués dans des conflits d’interets donc heureusement qu’on leur passe dessus de temps en temps.

  2. Pseudo dit :

    valoriser les possibilités de carrière à l’hôpital public????

    à l’hôpital public que l’on travaille beaucoup ou très peu on est payé pareil à l’hôpital public quelle que soit votre spécialité on est payé pareil

    à l’hôpital public un ca

  3. Severine dit :

    Venant l’hôpital,travaillant en clinique maintenant,cela a un coté rassurant d’avoir 1 presence permanente sur place surtt la nuit!!!!

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