C’est l’histoire d’un infirmier libéral pour qui la prévention primaire est tout aussi – voire davantage – importante que les soins. C’est aussi l’histoire d’un citoyen engagé dans les questions écologiques et environnementales, qui a depuis longtemps à cœur de préserver la santé des hommes et de la terre.
« Pour me réaliser et donner un sens à mon activité professionnelle, il fallait que je trouve quelque chose à la croisée de la santé primaire et de l’écologie », explique humblement David, qui depuis quelques années s’évertue à conseiller ses patients sur les produits qu’ils choisissent ou encore sur les comportements à adopter pour mieux préserver leur santé.
« Face à l’explosion des maladies chroniques, des maladies auto-immunes, du diabète, de l’infertilité et face aux conséquences sur le système de santé aussi que cela implique, il est urgent de s’investir davantage sur les champs de la prévention de la santé. Et je ne peux décemment pas me contenter de l’éducation sur les cinq fruits et légumes par jour et sur l’arrêt du tabac. Ce serait hypocrite et insuffisant », soutient David.
Des jouets des enfants aux cosmétiques : les risques du quotidien
Alors, quand il se rend chez un patient, l’infirmier cinquantenaire regarde la composition des cosmétiques et des produits qu’il utilise, fait le tour des jouets des enfants, estime la qualité de l’air intérieur, parle alimentation…
« Cela se fait naturellement. Les gens sont ravis car quelqu’un leur apporte enfin quelques informations utiles et bénéfiques », explique l’infirmier. Pour David, pas question néanmoins d’imposer quoi que ce soit. La relation doit se faire dans un climat de confiance sur le ton de l’échange. D’ailleurs, il admet que certains patients restent parfois totalement « hermétiques » à sa démarche. Alors, dans ce cas, il n’insiste pas… Il y reviendra peut-être, si l’occasion s’y prête, après quelques séances de soins.
« D’autres clients – c’est le terme que préfère utiliser David, ndlr – sont en demande, et même déterminés à changer leur façon de consommer. Mon intervention va donc varier en fonction de leur implication et de leur volonté personnelle, mais aussi en fonction de leur niveau de connaissance ».
Qualité de l’air, de l’eau, des sols, rayonnement, perturbateurs endocriniens contenus dans les produits de consommation quotidienne, ondes électromagnétiques, préparation à l’arrivée d’un nouveau-né : au fil du temps, David a acquis des connaissances sur les risques du quotidien. L’an dernier, souhaitant aller plus loin dans sa démarche, il a suivi une formation en santé environnementale à l’IFSEN (Institut de Formation en Santé environnementale). « Cela m’a permis de multiplier par cent mes pratiques en santé primaire. Cela a conforté et légitimé mon choix aussi. Aujourd’hui la façon dont j’exerce mon métier est en pleine adéquation avec mes valeurs », explique David.
« Saviez-vous que certaines fraises en France, en plus de l’utilisation des pesticides usuels, de leur pulvérisation par des arômes, étaient irradiées pour être mieux conservées ?, poursuit-il, après un silence. Il y a plein d’informations comme celles-ci qui ne sont pas connues, ni ouvertement communiquées. Je suis là, non pas pour affoler mes clients, mais bien pour les informer et les guider dans leurs choix ».
Avec un milieu médical et politique peu soucieux de ces questions, les choix seraient d’ailleurs parfois difficiles pour les patients. « Quand vous voyez que la seule crème hydratante remboursée par l’Assurance maladie comporte des perturbateurs évincés par ailleurs des produits du grand commerce, c’est une aberration que d’en faire une utilisation quotidienne », affirme-t-il.
Eviter certaines affections
« Ce qui est dommage, c’est que l’on priorise toujours le soin à la prévention » ajoute David. Car, si le soin entraîne de potentiels dommages, pour l’infirmier c’est un non-sens absolu…Pourquoi faudrait-il absolument attendre la survenue d’une maladie pour prendre soin de quelqu’un ? Pourquoi ne pas plutôt empêcher la survenue de ces maladies ? “Nous avons notre rôle propre à engager : certaines affections sont facilement évitables », analyse t-il.
Satisfait et optimiste, David se sent néanmoins parfois un peu seul avec sa démarche. S’il sait prendre le temps, il admet toutefois que des questions logistiques et financières peuvent le bloquer. Car la prévention n’occupe aucune place dans la NGAP (nomenclature générale des actes professionnels) : David n’est donc jamais rétribué pour cette activité. Et quand le soin pour lequel il est sollicité ne correspond qu’à une simple injection sous-cutanée par exemple, difficile pour lui de se permettre de rester trente minutes auprès du patient pour faire de la prévention environnementale.
D’autre part, il admet que les initiatives isolées ont leurs limites et que si seuls ses patients en bénéficient, les comportements collectifs ne sont pas prêts de changer. Alors, dans un futur proche, David a décidé de former ses pairs. Il prévoit de travailler en collaboration avec un centre de lutte contre le cancer pour former des groupes de soignants, mais aussi avec des mairies pour sensibiliser les administrations publiques.
Malika Surbled
Cet article est paru dans le numéro 21 d’ActuSoins magazine
(Juin /Juillet/Août 2016).
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David Deransart en 4 dates :
1989 : obtient son D.E. S’installe directement en libéral
1996 : suit une formation d’infirmier clinicien
2003 : s’installe pendant deux ans sur l’île de la Réunion. Est surpris et contrarié par l’explosion du diabète
2015 : suit une formation en santé environnementale (IFSEN).
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