Hygiène des soins : En libéral, des conditions peu propices (2/2)

Les manquements à l’hygiène n’épargnent pas les infirmiers libéraux. En cause, l’isolement et des conditions de soin périlleuses. Deuxième volet de notre dossier Hygiène, paru dans le numéro 27 d'ActuSoins magazine (déc 2017).

hygiène des mains infirmière libéraleC’est un objectif phare du programme national d’actions de prévention des infections associées aux soins (Propias) de 2015 : atteindre la ville. La fréquence des IAS [infections associées aux soins] y est en effet « méconnue et probablement sous-estimée », rapporte le groupe de travail national pluriprofessionnel « ville » (1). Et le peu d’audits sur les pratiques révèlent des failles.

En 2012 notamment, sept infirmiers libéraux (idel), sur 206 interrogés, satisfaisaient « à l'ensemble des recommandations relatives à une bonne hygiène des mains », selon une enquête de l’Institut de veille sanitaire en Seine-et-Marne. 64 % disposaient en permanence de masques, 23 % de tabliers à usage unique. Inquiétant « au regard [du risque de] transmission croisée de Clostridium difficile », des bactéries multirésistantes responsable de coliques pseudomembraneuses. Certains actes, comme la vaccination, sont aussi perçus à tort comme étant à bas risque infectieux (1). 60 % des idels continuent de préférer le lavage des mains à l’eau et au savon à la friction hydroalcoolique, révèle de son côté un sondage de l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) infirmière de Provence-Alpes-Côtes-d’Azur (Paca) en 2017.

Le domicile, pas un lieu de soins

Lucienne Claustres-Bonnet, présidente de l'URPS infirmière PACA

Lucienne Claustres-Bonnet, présidente de l'URPS infirmière PACA ©DR

« Nous pratiquons beaucoup d’actes à haut risque infectieux », rappelle Anne Raimbault, Infirmière libérale et membre du groupe de travail national sur les IAS. Plus de 90 % de l’activité a lieu au domicile. Soit pas dans un lieu de soins : non stérile, lits bas, pas de table près du patient… Les professionnels s’adaptent donc comme ils peuvent.  

Cela tient parfois de la gageure. Présence d’animaux domestiques ou absence de linge propre, l’environnement peut se révéler hasardeux. « C’est notamment très compliqué de prendre en charge des patients en situation de précarité élevée, avec parfois un déficit d’hygiène des locaux et des personnes, témoigne Lucienne Claustres-Bonnet, présidente de l’URPS infirmière Paca. Cependant, aller chez les gens donne une idée de leur véritable environnement. »

Virage ambulatoire

Dr Pierre Parneix, président de la Société française d'hygiène hospitalière

Dr Pierre Parneix, président de la Société française d'hygiène hospitalière. ©DR

Car le virage ambulatoire change la donne. « Un nombre croissant de patients sont pris en charge à domicile, avec des cathéters, des chambres implantables », note le docteur Pierre Parneix, président de la Société française d’hygiène hospitalière. En outre, en dépit du dossier médical partagé lancé en 2016,« 65 % des Idel [sondées en 2017 en Paca, ndlr] disent ignorer le statut infectieux des patients, rapporte Lucienne Claustres-Bonnet. C’est un problème majeur. 

Adaptées à l’exercice de ville (2), les recommandations de bonnes pratiques ne remédient par ailleurs pas à l’isolement. Les libéraux manquent d’appuis. Et les CPias (centres de prévention des infections associées aux soins) s’avèrent mal connus (1). « Il devraient s’intégrer dans les plates formes territoriales d’appui », plaide Lucienne Claustres-Bonnet.

Emilie Lay

(1) Enquête relative à la perception par les professionnels de santé du risque infectieux associé aux soins de ville, 2013

(2) Bonnes pratiques essentielles en hygiène à l’usage des professionnels de santé en soins de ville, SF2H, 2015

Un label pour parfaire ses pratiques

La Fédération nationale des infirmiers a lancé en 2016 un outil d’amélioration continue des pratiques : la charte Qual’Idel. Elle comporte six grands thèmes, dont la réalisation des soins, hygiène incluse. L’inscription, sur Internet*, donne accès à une documentation actualisée (guides, règlementations), des auto-évaluations annuelles, des audits qualitatifs et des formations par le cabinet conseil Carron consultants. A la clef, l’obtention d’un label qualité.

*qualidel.fr

Actusoins magazine pour infirmier infirmière hospitalière et libéraleCet article est initialement paru dans le numéro 27 d'ActuSoins magazine 
(Dec/Janv/Fev 2018).

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LIRE AUSSI le premier volet du dossier  : Hygiène des soins, un enjeu de sécurité

 

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