Une aide complète pour les femmes victimes de violence

Depuis bientôt trois ans, les femmes victimes de tout type de violences disposent d’un lieu dédié pour se faire aider : l'Institut en santé Génésique (ISG). Située dans l’enceinte de l’hôpital de Saint-Germain-en-Laye (Yvelines), cette structure unique en France offre une prise en charge gratuite, anonyme et pluridisciplinaire.

 
Une aide complète pour les femmes victimes de violence

En interne, les professionnels de l'ISG se réunissent tous les quinze jours pour échanger leurs points de vue. © DR


Dans le bureau de Frédérique Martz, la directrice de l’institut, le téléphone sonne. « Bonjour...Vous voulez venir tout de suite ? Venez, on vous attend. » Elle se lève pour aller prévenir l’infirmière. Dans quelques instants, une femme va passer la porte de l’ISG et l’infirmière va la recevoir pour un premier entretien. Cette femme vient pour une raison : elle est victime de violences et a besoin d’aide pour s’en sortir. Parce que les démarches et la prise en charge ne sont pas simples. Et c’est là toute la raison d’être de l’ISG, à savoir coordonner l’aide à apporter aux femmes victimes de violences sous toutes leurs formes : violences physiques, violences psychologiques, violences sexuelles, violences au travail, violences économiques, etc.
 
Déjà 880 femmes ont été prises en charge par l’ISG. C’est Frédérique Martz et le Dr Pierre Foldès, chirurgien urologue, qui sont à l’origine de cette structure. « Nous avons une philosophie commune qui est de ne rien lâcher, témoigne la co-fondatrice. Nous poussons nos murs en permanence afin de répondre à la multiplicité des besoins - sociaux, médicaux, juridiques - avec pour unique objectif de remettre la femme à sa bonne place dans la société. Car cette femme va avoir de multiples problèmes, qui ne sont pas forcément exprimés, mais qui vont devoir trouver une réponse. »
 

L'infirmière : première oreille attentive

 
L’équipe pluridisciplinaire – infirmière, médecin, psychologue, juriste, avocat - permet d'apporter une solution globale aux difficultés des femmes. Mais avant le déclenchement de cette coordination, la femme est reçue par l’infirmière pour un entretien de 45 minutes à 1 heure. Elles sont quatre à exercer au sein de l’Institut, toutes bénévoles.
 
« C’est dans l’ADN de l’infirmière d’écouter, elle a été formée à cela bien plus que les médecins », reconnaît le Dr Foldès. Elle est donc la première oreille attentive de la femme violentée. « L’infirmière d’accueil accomplit un énorme travail de première prise de parole, soutient Frédérique Martz. Elle rassure et donne des perspectives.»
 
« On a un rôle d’accroche de la personne »,précise Virginie, l’une des infirmières qui travaille deux demi-journées par semaine à l’Institut. Lorsque la femme arrive, elle doit se sentir écoutée, crue et surtout pas jugée. »
  
Le fait que les professionnels de la structure soient majoritairement des femmes les rassurent et leur permet de se sentir en sécurité. Lors de ce premier rendez-vous, elles ont une feuille de renseignements personnels à remplir. Une première approche qui permet d’éloigner la gêne et d’amorcer l’échange. Ensuite, place à l’écoute. Il est indispensable pour l’infirmière de connaître l’histoire de vie de ces femmes maltraitées, et pas uniquement la raison de leur venue. Ensuite, elle hiérarchise les problèmes par ordre de priorité afin d’organiser l’aide et la prise en charge par les autres professionnels.
 
« Je leur propose un entretien avec la psychologue puis avec la juriste », explique Virginie, qui les
informe rapidement de leurs droits sans insister. Car certaines femmes ne sont pas prêtes à enclencher une démarche juridique. « Elles n’ont parfois pas conscience de leur besoin mais après plusieurs rendez-vous avec la psychologue par exemple, elles vont avoir un déclic », souligne Axelle Cormier, adjointe de direction qui assure également des permanences juridiques. D’autres en revanche arrivent déterminées.
 

Un premier pas

Le contact avec l’infirmière s’arrête généralement ici. Elle peut éventuellement les revoir lors des cercles de parole. « On prend aussi des nouvelles par téléphone avec toutes les précautions que cela implique », précise Virginie. Ensuite, ce sont aux autres professionnels de prendre le relai. Ainsi, en cas de besoin, les femmes peuvent bénéficier dun accompagnement médical.
 
Elles peuvent par exemple être vues par les médecins des urgences de l’hôpital, lorsque des signalements de violences physiques ou psychologiques immédiats doivent être effectués. L’
ISG offre également une prise en charge spécifique pour les femmes victimes d’excision.
 
« Nous remettons d’abord la femme en santé si nécessaire, précise Frédérique Martz. Car tant que la personne n’est pas en bonne santé, elle sera confuse. Nous leur redonnons cette énergie pour avancer. » Elles vont également bénéficier d’un accompagnement psychologique pendant plusieurs séances. « Si je sens qu’il y a une dépression, j’en parle aux médecins ou aux infirmières pour uneorientation psychiatrique », rapporte Clémence Garnier, psychologue.
 
Enfin, elles peuvent être accompagnées par des juristes et des avocats pour faire
valoir leurs droits. « On les prépare au dépôt de plainte, on les aide à remplir un dossier d’aide juridictionnelle ou à contacter des associations partenaires », explique Axelle Cormier. En interne, les professionnels se réunissent tous les quinze jours pour échanger leurs points de vue.
 
Mais attention, l’ISG se veut coordinateur des intervenants agissant dans le cadre de leur mission
propre. L’objectif est d’intégrer les femmes victimes dans un parcours pérenne avec le relai de professionnels extérieurs à l’ISG, du secteur de la santé, du social ou de la justice. L’ISG a d’ailleurs
construit un maillage territorial afin que les acteurs locaux soient proactifs.
 
Des partenariats ont donc été conclus avec des médecins de ville, des gynécologues, des hôpitaux, des sages-femmes, des protections maternelles et infantiles (PMI) ainsi qu’avec leparquet et le barreau de Versailles.
 
Pour fonctionner, l’Institut perçoit quelques subventions publiques et des dons privés. « Mais nous avons besoin de plus de moyens car les besoins augmentent et nous continuions à conventionner avec le plus de dispositifs existants au bénéfice du mieux travailler ensemble », conclut Frédérique Martz.
 
Laure Martin
Pour information : L’Institut en santé Génésique assure des permanences les lundis, mercredis et vendredis de 9h15 à 13h30 et les mardis et jeudis de 13h30 à 17h30.
 

Actusoins magazine infirmierCet article est initialement paru dans le n°23 (Dec 2016) d' .

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Quelques chiffres
Parmi les femmes maltraitées qui se rendent à l’ISG, 40 % viennent des Yvelines. Les 60 % restant sont de Paris, d’Ile-de-France, et du reste de la France. Et leur profil évolue.« Nous recevons beaucoup de femmes confrontées à un long passé de violences cumulées sur 30, 40 voire 50 ans, signale le Dr Foldès. Et nous avons aussi de plus en plus de migrantes et de jeunes femmes qui ont entre 18 et 25 ans notamment parce que nous travaillons sur le harcèlement dans les universités
Il faut savoir que 70 % des femmes reçues à l’ISG ont été victimes de violence dans leur enfance. Et 60 % explique que les violences ont commencé au moment de leur première grossesse. Le point commun entre ces femmes : « Elles sont toutes victimes mais elles se demandent toujours si ce n’est pas de leur faute, signale Virginie. Il y a toujours un sentiment de culpabilité. »

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Réactions

3 réponses pour “Une aide complète pour les femmes victimes de violence”

  1. Il existe à Marseille SOS femme 13 qui accueille soutien et oriente les femmes victimes de violence

  2. Oui bon courage mais quel bonheur si ce genre de structure était plis développée

  3. Anne Rambois dit :

    Alors bon courage à vous toutes car il n’y a rien de plus difficile à faire : protéger des femmes de la maltraitance de leur chéri oui c’est leur chéri ! Il en est que l’on tire d’affaire à 1OO% car elles le quitte et là bravo on a accompli sa mission on est fier de soi et de nos protégées ! Mais certaines femmes, n’arrivent pas à quitter leur bourreau même après plusieurs passages aux urgences pour des blessures grâves, elles y retournent et elles finissent par en mourir : c’est cela qui est difficile à accepter ( psychologiquement destructeur, attention ! ) pour les soignantes qui aident ces femmes .

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