Les sourds sont des patients (presque) comme les autres

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A la base du réseau Sourds et santé, dans le Nord-Pas-de-Calais, une idée :  les personnes sourdes ont le droit, comme les entendants, de choisir leur médecin et leur lieu de soins. Alors il fait tout pour que cela soit possible.  

Les sourds sont des patients (presque) comme les autres

©Astier/BSIP

Offrir aux personnes sourdes un accès au soins digne de ce nom et aussi large que possible, c'est l'objet du réseau Sourds et santé implanté au sein Groupement hospitalier catholique de Lille (GHICL). Une première.

Certes, ses promoteurs ont ouvert à Lille en 2002 une Unité d'accueil et de soins aux sourds en langue des signes (UCAS).

« Mais dès le départ, ça me dérangeait que les sourds n'aient pas la possibilité, comme tout citoyen, de choisir leur médecin ou de se faire soigner où ils le voulaient », souligne le Dr Benoît Drion, coordinateur du réseau depuis l'origine.

En 2005, la création officielle du réseau, avec de nombreux partenaires, « concrétise un fonctionnement qui existe déjà », raconte le médecin. Il est financé par l'ARS Nord-Pas-de-Calais sur le fonds d'intervention régional (FIR).

 Libre choix

Outre l'unité d'accueil et de soins qu'il gère à l'hôpital Saint Philibert (Lomme), une activité importante du réseau consiste à coordonner les rendez-vous médicaux des patients.

Ils contactent la secrétaire (par mail, SMS ou fax) en précisant quel médecin ils souhaitent consulter et elle combine le rendez-vous médical et l'intervention d'un des interprètes, dont elle a le planning. En 2013, 447 consultations ont eu lieu dans ce cadre en 2013.

Depuis 2006, Sourds et santé a aussi ouvert des antennes dans chaque bassin de vie de la région, à Dunkerque, Arras et Valenciennes.

Une à deux fois par mois, le médecin du réseau (le Dr Drion), un travailleur social, une secrétaire et une psychologue, tous bilingues en langue des signes, accueillent les patients dans les hôpitaux de ces villes.

Le réseau sensibilise en outre les élèves des IFSI et des facultés de médecine à l'accueil des personnes sourdes et à la communication avec elles.

Il intervient également en formation continue dans les établissements, surtout auprès des soignants, pour des modules à base de jeux de rôles et de mises en situation. Enfin, il organise des conférences thématiques sur la vie sexuelle, l'alimentation et la cuisine, etc.

 Intermédiateurs

Aujourd'hui, le réseau compte une trentaine de salariés (pas tous à plein temps), des entendants pratiquant la langue des signes mais aussi des sourds : le médecin coordonnateur, des psychologues, des travailleurs sociaux, des secrétaires, des interprètes, une neuropsychologue, une assistante de recherche et des intermédiateurs.

« Ce sont des collègues sourds de formation paramédicale ou sociale dont la langue des signes (LSF) est la première langue. Ils ont une maîtrise très fine de la LSF et de ses formes dialectales », explique le Dr Drion.

Eux seuls peuvent comprendre les signes altérés d'une personne confuse ou hémiplégique, par exemple, et savent ce que c'est qu'être sourd... Ils aident considérablement les patients à comprendre les messages des professionnels. En 2013, 34% des consultants ne comprennent pas une consultation avec un interprète, souligne le coordonnateur du réseau.

De plus, ajoute-t-il, les personnes sourdes « tolèrent depuis qu'elles sont toutes petites un niveau de compréhension très bas ». Avec à la clé, angoisse et mauvaise observance des traitements...

Le réseau lillois est le premier (et le seul) en son genre. C'est d'ailleurs lui qui compile désormais, chaque année, les données d'activité de la douzaine d'unités d'accueil pour sourds. Son expérience constitue un modèle pour les autres intervenants de ce secteur.

Il est aussi à l'origine de l'ouverture, début 2013, du premier Ehpad spécifiquement adapté aux sourds. Et il a été primé, « coup de cœur du jury » du 17e "trophée de l'innovation handicap" organisé en juin par la Mutuelle nationale des hospitaliers (MNH).

Olivia Dujardin

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