Fonction publique hospitalière : le tabou du cumul d’activité

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Dans un rapport rendu public cette semaine, l’inspection générale des affaires sociales s’attaque à un phénomène connu de tous mais que peu évoquent ouvertement : le cumul d’activité des soignants, qui associent temps plein hospitalier et « extras » dans les établissements voisins.

Selon les estimations de l’inspection générale des affaires sociales, au cours de l’année 2008, parmi les 359 484 agents titulaires de métiers soignants ou médico-techniques, 24 547 ont été multi-actifs.

Des disparités importantes :

Le « cumulard » est principalement un homme jeune, soignant au sein d’un établissement de grande taille. Trois régions concentrent la moitié des pluriactifs : l’Île-de-France, Provence-Alpes-Côte-d’Azur et Rhône-Alpes.

Les infirmiers anesthésistes sont les plus nombreux à cumuler plusieurs activités.

Près de 80 % des « pluriactifs » sont considérés en situation  irrégulière, soit parce qu’ils exercent un emploi annexe en tant que salarié à temps partiel ou à temps plein, soit parce qu’ils sont salariés auprès de sociétés d’intérim.

La mission estime en outre qu’au moins 30 % des multi-actifs cumulent un grand nombre d’heures voire deux temps pleins tout ou partie de l’année.

Une « attitude plutôt bienveillante » des employeurs

S’il est bien réel, le phénomène du cumul d’activité ne semble pas inquiéter outre mesure les établissements de soins. Face à des difficultés de recrutement et de fidélisation, ils semblent en effet enclins à fermer les yeux sur ces pratiques.

D’autant que la majorité des responsables d’établissements interrogés considèrent que le cumul « ne crée pas de difficulté d’organisation ou n’influe pas significativement sur la qualité des soins. »

Attention toutefois : Lorsque le cumul est avéré, la procédure disciplinaire peut conduire à la révocation et donc à la perte du statut, même si l’IGAS constate la « quasi impossibilité pour un directeur d’établissement de faire la preuve du cumul d’emplois. »

Ainsi , L’AP-HP, pourtant potentiellement largement touchée par ce problème, n’a instruit que 8 cas en 9 ans, parmi lesquels seulement 2 IDE. Dans la plupart des cas, la sanction est toutefois la révocation directe de la fonction publique.

L’intérim en ligne de mire

Pour les auteurs du rapport, les sociétés d’intérim portent une large responsabilité dans cet état de fait : « Les entreprises de travail temporaire dans le domaine de la santé ont recours aux agents publics mais ne le reconnaissent pas facilement ». Avant de conclure : « L’intérim en santé constitue une source de cumul illégal d’activités non négligeable. »

Et l’IGAS de proposer deux mesures : Obliger les entreprises de travail temporaire à se porter garantes de la situation des fonctionnaires qu’elles recrutent et n’autoriser l’intérim qu’après deux années de diplôme infirmier, à l’instar de l’exercice libéral.

La première proposition de pose guère de problèmes aux sociétés interrogées : Pour Jérick Develle, Directeur général  d’Adecco Medical, « il est toujours utile de rappeler la règle. Nous faisons signer des documents très clairs aux intérimaires. »

Même son de cloche chez les concurrents : « On n’a pas attendu ce rapport pour respecter scrupuleusement les règles de non-cumul » soutient Stéphane Volleau, responsable marketing et commercial de l’Appel Médical.

L’idée de réserver l’intérim aux professionnels ayant plus de deux ans de diplôme est en revanche mal accueillie. « On est perplexes » affirme Stéphane Volleau. « Cette proposition est totalement déconnectée du reste du rapport » constate-t-il, avant d’ajouter : « Les intérimaires, comme les autres, sont diplômés par l’État au même titre que les autres. »

« C’est une erreur forte d’analyse » renchérit Jérick Develle, pour qui l’intérim permet « de se confronter au monde hospitalier et de compléter son apprentissage avant d’éventuellement se fixer »

« Le rôle de l’intérim dans le cumul est de toutes façons un épiphénomène », ajoute-t-il, considérant que la majorité des « pluriactifs » établissent « des contrats de gré à gré. »

Le cumul légal est-il possible ?

Si la législation s’est assouplie ces dernières années, les conditions de cumul d’activité légal restent limitées. Et pour cause : Le principe d’interdiction du cumul d’activités reste la règle. 

Quelles activités sont autorisées ? Notre dossier Fonctionnaire et cumul d’activité

Pour aller plus loin :

Cumul d’activités dans la fonction publique hospitalière – Inspection générale des affaires sociales
Cumul d’activités : pas toujours légal, mais rentable !

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Thomas Duvernoy

Voir les commentaires (51)

  • RESILIENCE : les infirmières ont des idées, à elles de les exprimer !?

    même si notre sujet de prédilection est la lutte contre l'ordre, devenu financier, afin d'obtenir la publication de son abrogation au J O, les infirmières et infirmiers que nous sommes ont des idées et des préoccupations professionnelles, autres, toutes aussi légitimes à faire valoir ... RESILIENCE s'est déjà - à plusieurs reprises - positionné sur des sujets comme la réforme de la LMD et la catégorie A, etc ...

    ces derniers temps alors que le printemps est loin derrière nous, les rapports et autres études - qui nous concernent directement - fleurissent à qui mieux mieux ...

    il semble que les couveuses d'élevages universitaires/étatiques, productrices de crânes d'oeuf formatés, soient très prolifiques ...

    il en est ainsi du rapport sur le cumul d'activités dans la FPH, il en est aussi de l'étude sur le rythme de travail, toutes deux visibles sur le site @ de l'inf.mag ou encore d'actusoins (entre autres) ...

    n ous ne pouvons rester insensibles à ces publications (dont certaines sont clairement de la provocation) et nous ferons chaque fois que cela nous semblera nécessaire, des courriers et autres lettres aux auteurs de ces rapports qui manifestement ne connaissent pas grand chose à nos professions paramédicales ...
    à défaut d'être pris en considération, ils ont le mérite d'exister et d'être sources de propositions ...

    ainsi un courrier vient d'être adressé aux rapporteurs sur le cumul d'activités, avec copie au ministre ...

    vos remarques et autres idées ou encore vos avis seront les bienvenus sur ces sujets !

    toutes les infos sur http://www.syndico.exprimetoi.net le site @ de RESILIENCE

  • vaste hypocrisie connue de tous. les hopitaux publics qui ont recours à l'interim s'habritent derrière les sociétés d'interim, mais les directions savent tres bien qu'il s'agit de personnel en grande partie du public. il existe de véritables "ponts aériens" entre certains CHU de l'aphp, et des des ch périphériques.
    au lieu de tirer sur l'ambulance, il faudrait plus considerer que cela répond à une difficulté réelle : les revenus trop bas des agents du public. certains agents en fin de carrières preferent partir en revenir comme intérimaire, car le public est incapable de valoriser les travail de ces agents.
    N'oublions pas que les plus grands defenseurs des valeurs du publics et des devoirs des fonctionnaires sont souvent des cumulards invétérés...
    de plus ces collaborations sont également une source d'enrichissement professionnel.

  • c'est l'histoire du serpent qui se mort la queue ! Les IDE fonctionnaires vont dans les sociétés d'intérim pour compléter leur revenus, la fonction publique fait appel aux sociétés d'intérim pour compléter leurs effectifs... Pas d'intérimaires pas de remplaçants pas de cumulards moins d'intérimaires (bcp moins d'intérimaires).
    Moi je les comprends. Si on prends mon cas ainsi que celui d'un ami fonctionnaire, on a été diplômé le meme jours je suis dans le privée bon je boss bcp mais je gagne 1000 euro de plus que lui par mois ! 1000 euro c'est énorme !!!! Je boss pas dans une sordide maison de retraite avec 250 résidents pour moi tu seul je fait juste des heures sup exonérés de cotisations...
    J'ai discuté avec une IDE de Tour elle fait tout comme moi 40h sup par mois soit 190h.
    Elle gagne 1700 euro (2 ans de DE) j'en gagne 2600... vous trouvez ça normal ? Moi non ! Alors oui je les comprends ! Est-ce que je ferais pareil a leurs place ? Non je partirais tout simplement de la fonction publique. Mais quid des patients ?

    • Quid des patients ?

      Mais jusqu'à quand on va rester englué dans notre merde "pour le patient" ?

      Notre rôle c'est aussi d'envoyer valdinguer ceux qui nous pressurent le citron depuis toujours en profitant de notre naïveté.

      Pour le patient nous devons refuser de travailler dans des conditions où la sécurité n'est plus assurée. Pour le patient on doit exiger d'être rétribué à hauteur de nous compétences.

      Marre de voir l'éternelle niaiserie de tout accepter "pour le patient". C'est juste histoire de se donner bonne conscience pour ne pas bouger son cul. C'est la bonne excuse pourne pas se heurter à la hierarchie.

      Le patient il a droit à un systeme de santé efficace avec des professionnels compétents. Et c'est aussi à nous de prendre nos responsabilités. Et notre responsabilité c'est aussi mettre nos dirigeants face aux leurs.

      En acceptant tout et n'importe quoi on se fait complice de la dégradation de notre systeme de santé et de la mise à bas de la sécurité des soins.

  • EN TOUT CAS RESTER DANS LE PUBLIC POUR BOSSER JUSQU''A 65 ANS AVEC LE SALAIRE DONNE ACTUELLEMENT JE LE DECONSEILLE A TOUT LE MONDE . PUISQUE DANS LE PRIVE LE CUMUL DES EMPLOIS EST PERMIS AUTANT TRAVAILLER DANS LE PRIVE !!! LES CONDITIONS DE TRAVAIL ET LE SALAIRE DANS LA FONCTION PUBLIQUE SONT LAMENTABLES : PAS DE QUOI VOUS ENCOURAGER A Y RESTER !!!!

  • Cette vieille règle devrait être abolie. Quand une loi est autant détournée, c'est qu'elle est caduque.

    Doubler les salaires n'est pas la solution ; car la plupart qui cumulent pour passer de 2000 à 3000 continueront demain pour passer de 3000 à 4000. Donc ça n'est pas le seul levier.

    Les médecins ont le droit au cumul et même à l'activité privé dans les murs du public ; pourquoi pas les infirmiers ?
    Il suffit d'aller en clinique pour y croiser nos propres médecins, nos collégues et même nos cadres. C'est un secret de polichinelle que ni les dirigeants de boite d'interim, ni les directeurs d'hôpitaux, DSSI et Cadre de santé ne peuvent ignorer.

    Ce qui est le pire, c'est que celles qui se font choper se font sanctionner ; c'est lamentable.

    • je cite:

      ""Cadre
      1 octobre 2011 à 7 h 22 min

      Les médecins ont le droit au cumul et même à l’activité privé dans les murs du public ; pourquoi pas les infirmiers ?

      .""

      C'est pas anodin que cette enquête ne concerne pas les médecins!! Certains se font des c-uilles en or" avec leurs consultations privées dans les locaux de l'hôpital public..n'ont m^me pas besoin de se déplacer,d'investir des locaux ou de faire des journées doubles!
      la loi s'appliquent donc seulement pour ceux de "l'étage inférieur"!!

  • Combien d'hopitaux publics fermeraient leurs blocs s'ils ne pouvaient compter sur les intérimaires qui viennent du... publique ????....... Cessez donc l'hypocrisie !!!!!!!