Philippe Colin, de la seringue au bistouri

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« Quand on veut, on peut, et quand on peut, on doit ». Philippe Collin répète souvent cette devise à ses quatre enfants. Et pour cause, il se l’est appliqué à lui-même tout au long de son parcours professionnel. A force de travail et de passion, ce bachelier littéraire est ainsi devenu infirmier puis chirurgien.

De son propre aveu, rien ne le prédestinait à un tel parcours. Le bac L en poche, Philippe Collin a d’abord tatonné, cherchant sa voie autour du sport : « j’ai passé le concours de professeur de sport, que j’ai raté. J’ai donc pensé rester en contact avec ce milieu en devenant kiné ».
A l’époque, l’AP-HP proposait un concours commun à plusieurs spécialités paramédicales : « je voulais kiné, mais j’ai eu infirmier ». Pas de déception, pourtant. Au contraire, une véritable découverte de l’univers du soin. « C’était vraiment une très bonne expérience, le métier m’a beaucoup plu ».
Mais en troisième année arrive le déclic. « J’étais en stage aux urgences et j’ai demandé à assister à une opération de chirurgie orthopédique. Ça a été une révélation. Dès cet instant, j’ai commencé à penser à devenir médecin, tout en restant persuadé que ce serait impossible : je me souvenais des bacheliers scientifiques qui avaient raté le concours alors que je n’avais qu’un bac littéraire ».

Philippe Collin change pourtant d’avis quelques semaines plus tard, à l’occasion d’un cours donné aux externes en médecine dans le service où il est en stage. « J’ai demandé à y assister, et je me suis rendu compte que le contenu était compréhensible, accessible ». La faculté de Bobigny propose alors un parcours de formation médicale expérimentale dans lequel le concours est aménagé pour accueillir les paramédicaux, avec peu de cours de maths ou physique, mais des cours d’anthropologie, de sociologie… et un système de points prenant en compte la pratique professionnelle. Philippe Collin se donne un an pour réussir. Il enchaîne les cours à la fac la journée et le métier d’infirmier la nuit. Et il décroche le concours. Plus tard, c’est avec la même volonté qu’il décrochera facilement l’internat et choisira la chirurgie orthopédique.
Aujourd’hui, il exerce à la clinique rennaise Saint Benoît en tant que spécialiste de l’épaule ; une spécialité dans laquelle il côtoie beaucoup de sportifs professionnels. Il conserve aussi une activité de recherche clinique pour laquelle il a été récompensé par un prix décerné en début d’année au Congrès international de chirurgie de l’épaule.

Au cours de son parcours, le spécialiste reconnaît que tout le monde a été bienveillant : « durant les quatre premières années de médecine au cours desquelles je continuais de travailler, mes collègues infirmiers m’ont vraiment aidé et soutenu, notamment lorsque j’étais fatigué. Les médecins aussi étaient très compréhensifs ».
Aujourd’hui de l’autre côté de la barrière, il n’exprime qu’une déception : celle de n’avoir pas réussi à rompre la barrière qui sépare le corps médical du paramédical.

Il enchaîne les cours à la fac la journée et le métier d’infirmier la nuit.

« Mais je reste très disponible, je fais en sorte d’instaurer un dialogue avec les infirmiers, et de toujours expliquer. Je veux vraiment démystifier l’aspect médical, le rendre clair et accessible comme cela m’a été donné de le voir. En réalité, j’ai rencontré beaucoup d’infirmiers qui avaient la capacité de devenir médecin. C’est un parcours difficile, mais il ne faut pas se fermer de portes si on en a vraiment envie ». Certains ont d’ailleurs franchi le pas, avec succès.

De son parcours soignant, Philippe Collin se sent-il plus proche de ses patients que les autres chirurgiens ? « Ce n’est pas à moi de le dire. C’est vrai que plus le métier est technique et moins le spécialiste est bavard ! Mais je pense que mon parcours infirmier dans des services comme la gériatrie ou la psychiatrie m’a apporté une certaine expérience de l’approche des patients »… et la preuve que « l’émerveillement et l’épanouissement sont les deux vrais moteurs pour avoir envie de bosser et réussir ».

Carole Guignot
Article paru dans Actusoins magazine

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