Vers une spécialité « infirmiers scolaires » ?

Vers une spécialité « infirmiers scolaires » ?

Les sénateurs ont ajouté le 5 mai à la proposition de « loi infirmière » un article créant la spécialité d’infirmier de l’Éducation nationale. Une reconnaissance et une petite révolution en perspective pour ces professionnels qui exercent auprès de tous les élèves.

© VH-studio / ShutterStock

Lors de son adoption au Sénat le 5 mai, la proposition de « loi infirmière » s’est vue enrichie d’un nouvel article qui reconnait les infirmiers de l’Éducation nationale comme une spécialité autonome.

L’amendement adopté par les sénateurs a été proposé par le Syndicat national des infirmiers conseillers de santé (Snics-FSU), syndicat majoritaire des infirmiers de l’Éducation nationale, et le Collège infirmier français, indique Saphia Guereschi, présidente du premier.

Le texte n’est pas encore définitivement adopté, il doit encore être examiné par une commission mixte paritaire (comprenant sept députés et sept sénateurs) qui peut choisir de maintenir cet article ou de le retirer. Mais cette étape et décisive pour la présidente du Snics, qui demande depuis sa création, en 1973, la constitution de cette spécialité. « Quoi qu’il arrive en commission mixte paritaire ou dans les prochains mois, personne ne pourra faire comme si une chambre du Parlement n’avais pas appelé à renforcer un corps de fonctionnaires et d’infirmières en particulier, insiste Saphia Guereschi. Il y a une prise de conscience que quelque chose d’important se joue dans les écoles » en matière de santé.

Un diplôme de niveau 7

Si le quotidien des infirmiers dits « scolaires » ne sera pas radicalement transformé, cet article, s’il parvient au bout de la navette législative, changera beaucoup de choses à leur cadre d’exercice. « Cela va changer la qualité de la pratique eet la sécurité du soin car en face des ces pratiques, il y aura des connaissance et des gestes professionnels plus réflexifs », préciser Saphia Guereschi.

Le changement majeur introduit par cet article réside dans le fait que cette spécialité sera accessible via un diplôme de niveau 7, soit bac+5, comme les Ibode, les IPA ou les Iade. Les postes des infirmiers de l’Éducation nationale sont actuellement attribués via un concours « qui porte sur des connaissances qui ne s’acquièrent pas en formation initiale, par le diplôme d’État, mais de manière personnelle, sur l’exercice dans l’Éducation nationale, le fonctionnement de la santé dans les écoles, les limites des missions des infirmières et le travail partenarial, par exemple. Les infirmières qui réussissent le concours se voient ensuite proposer une formation d’adaptation à l’emploi qui peut durer, selon les académies, entre deux et 21 jours. »

Avec la nouvelle formation qui devrait aboutir à l’obtention d’un diplôme de niveau 7 – que le Snics-FSU espère être un diplôme d’État – et qui devra donc durer deux ans, tous les nouveaux infirmiers de l’Éducation nationale devraient bénéficier d’une formation spécifique unique et solide. Et ils devront l’avoir suivie pour exercer (et le concours, nécessaire pour exercer dans la fonction publique, restera maintenu).

Le contenu de la formation sera précisé dans un second temps, par décret. Mais le syndicat majoritaire des infirmiers scolaires a élaboré en 2021 une maquette de master en alternance : « pour chaque mission, nous avons précisé les connaissances et les compétences nécessaires, indique Saphia Guereschi, et composé les deux ans d’études avec des modules dont certains sont communs à d’autres professionnels de l’Éducation nationale ou à d’autres infirmières. Nous avons présenté ce projet il y a quatre ans mais le ministère de la Santé l’a bloqué car il ne voulait pas, à ce moment-là, créer de nouvelles spécialités. » Les sénateurs, eux, en ont décidé autrement.

Double tutelle

« Si cet amendement passe, poursuit la présidente du Snics-FSU, un travail réglementaire va s’ouvrir sur le référentiel de compétences des infirmières de l’Éducation nationale, le contenu pédagogique et le cadre de formation. Nous, nous demandons une double tutelle des ministères de la Santé et de l’Éducation nationale. » À juste titre puisque, comme le prévoit l’amendement, le rôle des infirmiers scolaires « s’inscrit dans la politique générale de l’Éducation nationale, dont l’objectif est de contribuer à la réussite de tous les élèves et étudiants ». Il faudra aussi définir des modalités de validation des acquis de l’expérience pour les infirmiers déjà en poste.

Cette réforme, si elle est définitivement adoptée, ne devrait pas modifier profondément la rémunération des infirmiers concernés. D’ailleurs, la rémunération ne constitue pas un moteur ni un enjeu des revendications du syndicat pour la création de la spécialité, précise sa présidente.

Il demande certes que le traitement des IDE de l’Éducation nationale, qui sont des fonctionnaires d’État, atteigne le minimum de celui des autres corps de catégorie A de cette fonction publique. Mais le complément de traitement indiciaire (CTI) de 49 points qu’ils ont obtenu en 2024, en miroir, plus ou moins, des revalorisation salariales décidées lors du « Ségur », a amélioré leur rémunération.

D’ailleurs, « depuis le CTI, souligne Saphia Guereschi, les concours font de nouveau le plein. Mais ensuite, beaucoup d’infirmières quittent le corps car elles ne sont pas reconnues et n’ont pas la formation nécessaire. La formation, c’est la clé pour conserver les collègues en poste ». Et constituer la – potentielle- future spécialité.

Géraldine Langlois

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