SSIAD : organisation millimétrée pour prise en charge optimisée

Laure Martin
3 septembre 2025

L’Association de soins à domicile de Melun et sa région (ASDMR), communément appelée SSIAD (services de soins infirmiers à domicile) de Melun (Île-de-France), oeuvre depuis 1982 à la prise en charge des patients du territoire. En 2023, une restructuration interne a fait place à une nouvelle organisation.

Estelle est aujourd’hui en charge de l’organisation administrative des tournées, un poste que les infirmières occupent ici à tour de rôle. © Laure Martin

160 places, 45 aides-soignants, 6 infirmières en soins généraux, 2 infirmières de coordination (Idec), 1 cadre de santé, 1 directrice et du personnel administratif. 20 tournées aides-soignantes et 3 tournées infirmières le matin ; 12 tournées aides-soignantes et 2 tournées infirmières le soir, organisées autour de 3 secteurs géographiques. Forcément, pour éviter le moindre couac, l’organisation interne est précise, avec des infirmiers pour les soins techniques, des aides-soignants pour le nursing, et le reste de l’équipe à la coordination. Ce matin, Safia, infirmière a commencé sa tournée à 7 h et la terminera à 14 h. Ses consoeurs travaillent sur des créneaux 8 h 15 – 15 h 15, 11 h – 18 h et 12 h 45 – 19 h 45. En arrivant au SSIAD, Safia récupère les clefs de ses patients sur un tableau sécurisé. Dans la bannette dédiée à son secteur, elle collecte les ordonnances des médecins ainsi que, si nécessaire, le matériel pour réaliser les prélèvements sanguins. Sur son téléphone professionnel, elle accède à sa tournée ainsi qu’aux fiches patients, qui détaillent les plans d’accompagnements personnalisés (PAP) des patients et l’ensemble des prises en charge. Cela fait maintenant un peu plus d’un an qu’elle exerce au SSIAD. « J’ai toujours aimé les soins à domicile, le contact avec les patients, l’intimité, le temps dédié pour faire les soins, raconte-t-elle. L’approche est différente de celle de l’hôpital. »

actusoins magazine pour infirmière infirmier libéralCet article a été publié dans le n°55 d’ActuSoins magazine (janvier 2025).

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Des soins techniques et de nursing : une répartition des rôles

Safia est infirmière depuis un an au sein du SSIAD de Melun. © Laure Martin

Ce matin, elle se rend chez un patient de 86 ans, diabétique et atteint de troubles cognitifs. « Il ne parle pas vraiment, confie-t-elle. Nous lui faisons uniquement le contrôle de la glycémie et l’injection d’insuline. » Une fois la prise en charge terminée, elle coche sur l’application téléphonique les soins qu’elle a dispensés, et les note également dans un « cahier bleu », qui reste au domicile des patients, accessible aux autres acteurs du domicile. Sa deuxième patiente du matin, atteinte d’une sclérose en plaque, est aussi diabétique. « Elle est globalement réticente à prendre ses traitements car elle n’observe pas d’effets sur son état de santé, ce qui nous amène parfois à devoir négocier », indique Safia, constatant qu’elle n’a justement pas pris ses médicaments de la veille. La patiente a aussi annulé un rendez-vous hospitalier pour l’extraction de trois dents. Autant de sujets que Safia abordera à 13 h 30 au moment des transmissions avec ses consoeurs. Outre la préparation des piluliers, la délivrance des traitements et la surveillance, les infirmières du SSIAD effectuent des prises en charge techniques : prises de sang, injections et perfusions, changement de sondes, pose de cathéters (s/c ou IV), pansements d’escarre, etc. Elles peuvent également gérer les rendez-vous des patients isolés ou encore la livraison des traitements, en lien avec les pharmacies ou les prestataires de santé à domicile. Ces dernières missions sont parfois effectuées par l’infirmière en charge de la gestion administrative des tournées. « Nous nous relayons sur ce poste », explique Estelle, infirmière, dont c’est aujourd’hui la mission. Quotidiennement, l’une d’elles arrive à 11 h au SSIAD afin de s’occuper du planning des tournées du lendemain ou modifier les heures de passages des soignants en fonction des imprévus des patients communiqués aux SSIAD ou via les transmissions des infirmiers.

En parallèle des tournées infirmières, les aides-soignants assurent, au domicile des patients, les soins de nursing. « Nous intervenons pour maintenir leur autonomie, rapporte Magali, aide-soignante. Dans le cadre de notre accompagnement, nous prenons le temps de discuter et de les écouter car nous sommes souvent leur seule visite de la journée. » Les aides-soignants peuvent parfois effectuer des tournées en binômes, notamment pour les patients lourds et complexes, ce qui « réduit les risques d’accidents du travail, face à des manipulations parfois difficiles », précise Magali. « Cette organisation nous permet aussi de respecter les habitudes de vie des patients », ajoute Marie-Jeannette, sa consœur. Les aides-soignants travaillent également avec un téléphone professionnel afin d’accéder à tout moment au plan de soins du patient et effectuer les transmissions. En cas de problème, ils entrent en contact avec les infirmières de leur secteur, qui peuvent se rendre sur place si besoin.

La mission de coordination

Pendant que Safia poursuit sa tournée, dans les locaux du SSIAD, Rachida Sahoud, Idec, s’apprête à partir chez un éventuel nouveau patient. À chaque demande d’inclusion, l’une des deux Idec fixe un rendez-vous téléphonique préalable avec le patient et/ou sa famille « pour comprendre la demande et s’assurer qu’il entre dans les critères de prise en charge du SSIAD », raconte-t-elle, en préparant ses affaires. Lorsque toutes les cases sont au vert, elles prennent rendez-vous pour une rencontre au domicile afin de consulter les ordonnances et les comptes rendus médicaux, de s’informer sur les habitudes de vie du patient, d’évaluer l’état du logement et de vérifier le matériel à disposition.

Les Idec ont également pour mission d’effectuer les plannings des tournées des aides-soignants, généralement au jour le jour, afin de s’adapter aux éventuelles demandes des patients et aux absences des soignants. Dans ce dernier cas, l’Idec peut soit redispatcher une tournée sur celles des autres soignants présents, soit faire appel à des vacataires, en passant par une plateforme. Elles organisent aussi des réunions de secteur, afin d’échanger sur les patients. « En cas de problème sur le terrain, nous pouvons être amenées à nous déplacer pour chercher des solutions à d’éventuels conflits ou événements indésirables », rapporte Audrey Defrance, Idec. Elles animent, en outre, des réunions de tournée, à visée d’optimisation organisationnelle et des réunions flash en cas d’urgence sur une situation au domicile d’un patient.

Une nouvelle organisation

Ce rôle a été établi en 2023, à la suite du départ de l’ancienne infirmière de coordination, conduisant à une réorganisation des fonctions de chacun. Désormais, la cadre de santé, Isabelle Vasseur, qui auparavant assurait des missions d’Idec, est centrée dans sa fonction. Elle gère les plannings de travail des infirmières et aidessoignantes. Elle est également chargée de la gestion de la qualité, à savoir la rédaction des protocoles de ressources humaines et des protocoles de soins. « Je fais aussi vivre, une fois par trimestre, les groupes de travail sur le circuit du médicament, les chutes, l’état cutané, la bientraitance ou encore les événements indésirables », rapporte-t-elle. Ces groupes ont été constitués en réponse au nouveau référentiel d’évaluation qualité mis en place par la Haute Autorité de santé (HAS). « Avec la directrice du SSIAD, nous l’anticipons car de nombreux critères sont à respecter », indique Isabelle Vasseur. Pour accompagner ce changement organisationnel, « nous avons mis en place des séances de régulation avec une psychologue, par groupe de six à sept soignants, dans le but de recentrer chacun sur son rôle auprès du patient et ainsi enlever les tensions entre les professionnels », souligne Martine Soupin, la directrice du SSIAD. Elle a par ailleurs intégré à la gestion du SSIAD, le management en mode intelligence collective. « Dès lors qu’un problème se pose, plutôt que d’imposer des injonctions d’en haut, chacun doit s’impliquer pour suggérer une solution », explique-t-elle. Une démarche qui renforce la cohésion d’équipe.

Laure MARTIN

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