Comprendre et faire vivre le don d’organes

Comprendre et faire vivre le don d’organes

Depuis 23 ans, le 22 juin est dédiée à la journée de réflexion sur le don d’organes et la greffe. Le Pr Michel Tsimaratos, directeur de la politique médicale de l’Agence de la biomédecine en évoque les enjeux.

Le Pr Michel Tsimaratos, directeur de la politique médicale de l’Agence de la biomédecine. © Aurélia Blanc

Quelle est la finalité de cette journée dédiée au don d’organes ?

Cette journée nationale permet de mener une réflexion sur le don d’organes ainsi que sur la greffe, et d’exprimer notre reconnaissance aux donneurs. La greffe représente une chaîne de solidarité et de grande expertise. Derrière chaque greffe, il y a un renouveau, une seconde chance, une seconde vie pour les personnes concernées.

Un donneur peut contribuer à sauver cinq à six patients voire plus avec les dons de tissus. Ce n’est pas anodin. En France, 8000 personnes se sont inscrites en 2024 sur la liste d’attente, tout organe confondu. Environ 6000 greffes ont été réalisées. De fait, chaque année, le nombre de personnes inscrites augmente. Aujourd’hui, 22 000 personnes sont en attente.

L’enjeu est de dimension nationale.

Cette journée représente également l’occasion pour chacun de faire connaître sa volonté sur le don…

Effectivement car aujourd’hui, lorsque nous menons des enquêtes, 80 % des personnes affirment être d’accord avec l’idée de donner leurs organes. Mais en pratique, les chiffres sont différents.

Lorsque nous effectuons des baromètres, 90 % des gens disent connaître la loi Caillavet de 1976, texte depuis lequel chacun est présumé être donneur sauf en cas de refus exprimé de son vivant. Mais lors d’un décès, lorsque les membres de la coordination hospitalière des prélèvements d’organes et de tissus demandent aux proches si la personne décédée était d’accord pour le don de ses organes, 37 % rapportent un non.

L’écart entre les 80 % qui affirment vouloir donner et les 63 % qui peuvent réellement le faire après l’avis des proches est important. Le problème repose selon nous sur le fait que les personnes ne communiquent pas sur leur volonté de donner ou non leurs organes, et ne peuvent donc pas exercer ce droit à la solidarité. Agir aujourd’hui, c’est en parler à nos proches de notre vivant.

Quels sont les autres obstacles aux dons d’organes et de tissus ?

Les idées reçues ! Il faut les combattre ! Tout d’abord celles autour de l’âge. L’âge moyen des donneurs est de 57 ans. Mais il est possible de donner ses organes à tous les âges, même à 95 ans. Personne en dehors des médecins ne peut apprécier la possibilité ou non de donner ses organes ou ses tissus.

Une autre idée reçue consiste à croire qu’une personne en mort encéphalique, n’est pas réellement décédée. C’est pourtant bien le cas puisque les battements du cœur sont maintenus par des moyens techniques, ce qui rend cette personne donneuse d’organes potentielle. Il faut aussi savoir que le don d’organes est strictement encadré avec beaucoup de rigueur ; les organes doivent être qualifiés pour la greffe et sont prélevés uniquement pour être donnés.

Enfin, le don d’organes est compatible avec tous les rites funéraires. Les représentants des différents cultes se sont positionnés en sa faveur. C’est le travail des coordinations hospitalières d’en parler avec les familles qui s’y opposent pour des raisons religieuses et de leur préciser que la seule interdiction au don repose sur le refus exprimé par le défunt. Les professionnels de la coordination hospitalière, notamment les infirmiers, jouent un rôle de premier plan et pour eux, le don donne du sens à leur travail.

Sont-ils formés pour le faire ?

Pouvoir discuter du don d’organes et de tissus avec une famille endeuillée, dans un contexte de perte d’un proche est un vrai métier.

Les infirmiers reçoivent d’ailleurs une formation spécifique sur la façon de faire passer un message de solidarité dans un moment de drame absolu. Leur posture est fondamentale. Aujourd’hui, les équipes de la coordination hospitalière sont dimensionnées en fonction de la taille des hôpitaux pour qu’elles aient une action optimale.

Mais il appartient aux directions de veiller à ce que tous les postes soient pourvus. La problématique d’attractivité du métier en général peut influer sur la composition de ces équipes. L’Agence de la biomédecine leur dispense des formations en présentiel et en distanciel pour les accompagner. Elles sont particulièrement soutenues, notamment par les services régionaux d’appui aux coordinations hospitalières et ne sont donc pas seules pour mener ce travail de solidarité.

Propos recueillis par Laure Martin

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