« Sportez-vous bien » : pour les jeunes patients en oncopédiatrie

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Grâce au partenariat entre le centre de lutte contre le cancer de Lille et une association locale, des jeunes patients hospitalisés en oncopédiatrie bénéficient d’activités physiques et sportives adaptées. Cet article est paru dans le n°36 d’ActuSoins Magazine (mars 2020). Il a été rédigé avant la crise Covid : ces activités ont depuis été suspendues en raison des protocoles sanitaires. L’association « Des étoiles dans les yeux » espère pouvoir les proposer de nouveau dans les semaines à venir. 

Delphine Fauqueur, éducatrice médico-sportive avec Lou qui découvre la pratique du cirque. © Géraldine Langlois.

Tir à l’arc, tennis de table, handball, croquet… les enfants, adolescents et jeunes adultes qui fréquentent le centre de lutte contre le cancer Oscar Lambret, à Lille, peuvent pratiquer deux fois par semaine toutes sortes d’activités physiques et sportives.

L’association « Des étoiles dans les yeux » met à leur disposition deux fois par semaines, depuis 2017, une éducatrice médicosportive spécialisée en sport adapté.

Elle est présente le mardi après-midi et le jeudi toute la journée. Deux créneaux horaires qui permettent à Delphine Fauqueur d’organiser des séances individuelles ou collectives d’activité physique aux enfants hospitalisés mais aussi à leurs parents. Ce projet, « Sportez-vous bien », a été récompensé par un prix Unicancer fin 2018.

Activités adaptées

Le jeudi matin, elle participe à une réunion d’équipe avec les soignants et les autres intervenants (sophrologue, éducateur spécialisé, assistante sociale, etc.) qui participent à la prise en charge globale des enfants développée dans le service d’oncopédiatrie. « Nous échangeons beaucoup d’informations, souligne l’éducatrice médicosportive. Les médecins nous disent si l’état de santé ou le traitement d’un enfant est compatible avec la pratique d’une activité. »

Pour certains enfants en effet, « il peut y avoir des restrictions », souligne Sylvie Mercier, cadre de santé du service. Les soignants peuvent aussi, lors de cette réunion, évoquer les enfants qui pourraient tirer profit de la la pratique d’une activité physique et auprès desquels Dephine Fauqueur insistera peut-être un peu plus…

Ensuite elle passe dans toutes les chambres des enfants et jeunes potentiellement concernés (de trois à vingt-cinq ans) et leur propose de la retrouver un peu plus tard pour pratiquer une activité physique. Ils sont généralement partants : « j’ai peu de refus catégorique », observe-t-elle.

Quand ils sont disponibles, elle les retrouve dans la salle « ado », la salle de classe lorsqu’elle n’est pas utilisée, parfois dans leur chambre ou encore dans les couloirs pour le tir à l’arc – avec des flèches à ventouses. Elle les accompagne généralement de manière individuelle. Pour pratiquer en collectif, il faudrait en effet que les participants aient un âge proche et soient disponibles en même temps, ce qui arrive peu souvent parmi les jeunes hospitalisés dans les douze chambres du service. 

Sourire

« La durée de la séance dépend de l’état de santé de l’enfant, remarque Delphine Fouqueur, mais elle varie généralement entre une demi-heure avec les plus jeunes, quarante-cinq minutes avec les enfants un peu plus âgés et une heure avec les plus de douze ans. Tant que ça leur donne le sourire. » Un indicateur infaillible !

Les participants qui choisissent l’activité parmi le large éventail des possibilités : foot, hand, volley, badminton ou tennis avec un ballon de baudruche à la place du ballon ou de la balle habituels, tir à l’arc, vélo elliptique, jeux de lancer, cirque, croquet ou bowling… Des activités parfois adaptée à leurs aptitudes du moment : certains sont très fatigués par leur traitement.

Lou, en hôpital de jour, cette semaine-là, a dû arrêter la danse moderne à cause de la maladie alors quand Delphine Fouqueur lui a proposé de venir avec elle, elle a accepté, pour « s’ennuyer moins » et découvrir les pratiques liées au cirque.

Elle est venue avec son pied à perfusion dans la salle de classe inoccupée. L’éducatrice médicosportive pousse un peu les tables et les chaises et lui présente le matériel. La fillette s’applique à faire tourner l’assiette chinoise, fait sauter le bâton du diable puis jongle avec des foulards colorés… Delphine Fauqueur lui montre les gestes et l’encourage. « La prochaine fois, propose-t-elle, on fera du tir à l’arc ! ».

Evacuer les tensions

Selon Delphine Fauquer, « bouger, avoir une activité physique , induit une sensation de bien-être qui fait qu’on pense forcément moins – ou plus du tout – à son traitement ». © Géraldine Langlois

Certes, aucune étude n’a prouvé officiellement les bienfaits de cette pratique chez les enfants. Cela a d’ailleurs des conséquences sur le financement de telles activités : ici, c’est l’association qui finance l’intervention de l’éducatrice et le matériel.

Mais ces effets positifs sont prouvés chez les adultes et « nous sommes convaincus que c’est un plus » pour les enfants, souligne la cadre de santé. Tout d’abord, ils ont naturellement envie de se dépenser, poursuit-elle, « et bouger, avoir une activité physique, induit une sensation de bien-être qui fait qu’on pense forcément moins – ou plus du tout – à son traitement » ou à la maladie.

Ces pratiques permettent aussi « d’évacuer les tensions », ajoute Frédéric Courtin, éducateur spécialisé dans le service, qui coordonne le projet. Selon Delphine Fauqueur, le fait de participer aux activités proposées aide les enfants et les jeunes qui pratiquaient régulièrement une activité à renouer avec une pratique physique, la même ou une autre. « Cela leur fait du bien de continuer », résume-t-elle. Aussi, ces activités adaptées montrent à ceux qui pensent « ne plus pouvoir rien faire », du fait de la maladie et des traitements, que ce n’est pas vrai !

Comme le calendrier des soins des enfants ne coïncide pas forcément avec les jours de présence de l’éducatrice médicosportive, il est difficile de mener un suivi des enfants mais Delphine Fauqueur met en place une évaluation du niveau de fatigue et de bien-être des jeunes participants avant et après les séances. Elle fait aussi toujours part de ses observations auprès des professionnels de santé. « C’est important pour nous, infirmières, d’avoir un retour de sa part sur les enfants qui participent à une séance », souligne Valérie Fournier.

Les parents aussi

L’éducatrice médicosportive intervient aussi, une des trois demi-journées où elle est présente, auprès des parents des enfants hospitalisés. « Souvent, ils sont tellement préoccupés par la maladie de leur enfant qu’ils ne vivent plus qu’à travers lui et s’oublient », observe-t-elle.

Quand elle fait le tour des chambres, elle propose donc aux parents qui sont partants de venir la retrouver quand ils le souhaitent : elle est disponible pour les accompagner entre 10h et 12h.

Avec les adultes, elle propose, selon leurs souhaits, du renforcement musculaire avec des altères, des poids, des swiss balls, mais aussi de la gym douce, du tennis de table, du tir à l’arc ou encore de la marche sportive. Contrairement aux enfants, en effet, ils peuvent pratiquer à l’extérieur de l’établissement. Avec Delphine Fauqueur, certains pratiquent seuls, d’autres en petits groupes.

Pendant les séances, ils parlent d’autre chose que de la maladie de leurs enfants, remarque-t-elle : « cela leur permet de se vider l’esprit. Pour certains, cela amorce un retour vers une remise au sport. » Pour Sylvie Fournier, « les parents qui acceptent de participer sont toujours satisfaits. Ils s’autorisent si peu de temps pour eux ! Et ils apprécient qu’on prenne aussi soin d’eux. Ils peuvent aussi participer aux séances d’art-thérapie ou de sophrologie. ». La prise en charge globale que l’équipe, au sens large, tisse autour des enfants concerne aussi, leurs parents.

Invités de marque

Des événements liés au sport sont aussi organisés de temps en temps dans le service et réunissent les jeunes patients, leurs frères et sœurs et leurs parents. « Nous faisons venir des sportifs de haut niveau comme un champion olympique de handball ou un champion d’Europe d’aviron, témoigne Frédéric Courtin. Ils peuvent échanger et faire un peu de sport ensemble. Cela peut-être très gratifiant pour certains jeunes patients de se dire « j’ai fait du sport avec un grand professionnel ! ». »

Ces événements, comme les séances animées par Delphine Fouqueur, permettent entre autres, selon lui, de « diminuer le niveau d’angoisse lié au lieu ». Et de garder aussi de l’hôpital quelques bons souvenirs.

Géraldine Langlois

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Cet article est paru dans le n°36 d’ActuSoins Magazine (mars-avril-mai 2020)

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