Hôtel hospitalier : l’alternative à l’hospitalisation

Quarante-et-un établissements hospitaliers ont été sélectionnés en juillet 2017 pour participer à une expérimentation sur les hôtels hospitaliers. Quels avantages pour les patients ? Quels changements pour les soignants ? Le point sur ces expériences. Cet article est paru dans le n°36 d'ActuSoins Magazine (mars 2020). Il a été rédigé avant le début de la crise sanitaire, ndlr. 

La maison des parents de l'hôpital Foch réserve des chambres pour l'hôtel hospitalier

La maison des parents de l'hôpital Foch réserve des chambres pour l'hôtel hospitalier. © Delphine Vaisset.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 prévoit, dans son article 53, la possibilité pour les établissements hospitaliers de proposer à leurs patients une prestation d'hébergement temporaire non médicalisé, en amont ou en aval de leur hospitalisation.

Une expérimentation a ainsi été lancée, précisée dans le cadre d’un arrêté du 2 février 2017 à l’initiative de la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) et financée par le Fonds d’intervention régionale (FIR) à hauteur de 1.1 million d’euros par an.

« Cette expérimentation pose la question de l’accueil des patients à l’hôpital dans un système de santé en plein virage ambulatoire », indique Aziza Fereuze, spécialiste des questions de prise en charge et assurance maladie à France Assos Santé.

Face à cette évolution, l’hospitalisation n’est donc plus toujours justifiée mais pour certains soins les patients doivent néammoins se trouver à proximité des établissements. Dans ce contexte, « les hôtels hospitaliers répondent à un besoin mais ils ne doivent pas être un prétexte pour effectuer de l’ambulatoire à tout prix », met en garde Aziza Fareuze.  

Différents modèles

Les quarante-et-un centres hospitaliers sélectionnés pour l’expérimentation ont décidé librement du type d’hôtel auquel ils souhaitent avoir recours. Ils peuvent par exemple contractualiser une prestation avec un hôtel qui réserve alors une quantité de chambres pour les patients.`

C’est l’option choisie par le Centre régional de lutte contre le cancer Gustave Roussy (Ile-de-France) qui a une antériorité dans le recours aux hôtels hospitaliers depuis 1988. Le choix s’est porté sur deux hôtels à proximité avec lesquels le centre a conclu un partenariat pour 114 chambres. « Le taux d’occupation des chambres varie de 93 à 106 % », souligne Marie Bascoul, directrice achats, logistique, ingénierie et investissements au sein de l’établissement.

Certains établissements détenteurs de nombreux bâtiments, dont certains sans activité médicale, ont transformé certains d’entre eux en hôtels hospitaliers. Enfin, le troisième modèle, celui choisi par l’hôpital Foch (Ile-de-France), consiste à avoir recours à une maison des parents. « Nous travaillons avec celle située en face de l’hôpital, qui nous réserve cinq chambres quotidiennement, car la notion de proximité est très importante », fait savoir Stéphanie Forte, directrice des affaires médicales et des coopérations à l’hôpital Foch.

Cette maison à l’avantage d’offrir une vraie qualité hôtelière. « Les patients ne sont pas dans un hôpital, ils peuvent avoir des accompagnants, des bénévoles qui les encadrent et des activités peuvent être organisées », énumère-t-elle.

Le profil des patients

C’est le médecin qui propose aux patients d’avoir recours à l’hôtel hospitalier. Mais dans certains cas, les cadres de santé des services peuvent eux-aussi encourager les praticiens à proposer un tel choix aux patients qui conservent leur autonomie car l’hôtel n’est pas médicalisé.

La notion d’éloignement géographique est l’une des principales raisons d’orientation des patients vers l’hôtel hospitalier.  L’hôpital Foch propose une offre MCO classique mais est réputé pour ses spécialités en neurochirurgie, en transplantation pulmonaire notamment pour les patients atteints de mucoviscidose ou encore en Procréation médicale assistée (PMA). « Nous pouvons recevoir des patients qui viennent de loin, notamment de l’Ile de la Réunion », précise Stéphanie Forte.

Trois profils de patients vont majoritairement bénéficier des hôtels hospitaliers. Tout d’abord ceux qui ont une opération programmée : pour éviter l’hospitalisation la veille, ils vont être hébergés à l’hôtel hospitalier. Deuxième cas : les patients en séjour itératifs notamment en cures de chimiothérapie et qui habitent loin alors que les médecins préfèrent les savoir à proximité. Enfin, les patients qui doivent être revus le lendemain de leur opération.

Les conditions tarifaires variables

Les conditions tarifaires varient d’un hôtel hospitalier à un autre. La majorité des établissements hospitaliers ont décidé de prendre à leur charge les coûts générés par ce service. Gustave Roussy a cependant fait le choix de facturer l’hébergement aux patients à hauteur du forfait hospitalier, soit 20 euros la nuit, comme prévu dans le décret, le reste de l’enveloppe attribuée à l’établissement via le FIR permettant de compenser le reste du coût même si « nous ne couvrons pas l’ensemble de nos dépenses », indique  Marie Bascoul.

« Nous pourrions aller au-delà des cinq chambres qui nous sont dédiées mais sans modèle économie pérenne, ce n’est pas possible », affirme Stéphanie Forte. Il s’agit de l’une des interrogations à laquelle l’expérimentation doit répondre. France Assos Santé regrette cette hétérogénéité dans la prise en charge du reste à charge, entraînant une inégalité de traitement entre les patients.

L’hôtel hospitalier reste une alternative à l’hospitalisation ou au transport sanitaire. Les patients ne souhaitant pas en bénéficier ne se voient en aucun cas privés des deux autres options. « Les patients peuvent refuser la proposition du médecin », indique Marie Bascoul, précisant que cela reste rare.

Le recours à l’hôtel hospitalier ayant un côté très rassurant pour les patients, il reste plébiscité car « ils voient le lien continue entre maison des parents et l’hôpital », conclut Stéphanie Forte.

Laure Martin

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« Nous sommes satisfaits et les patients aussi »

Isabelle Testa Foch, cadre de santé en pneumologie à l’hôpital Foch

« Nous utilisons l’hôtel hospitalier en cas de manque de lit disponible. Lorsque des patients viennent pour un suivi de transplantation et sont autonomes, nous nous concertons avec le médecin et s’il y a de la place à la Maison des parents, nous leur proposons.

Généralement, nous attendons qu’ils arrivent à l’hôpital pour nous assurer qu’ils n’ont pas de problèmes de santé. Si certains patients refusent cette option car l’hospitalisation les rassure, majoritairement, ils en sont satisfaits car ils savent qu’ils vont avoir une certaine autonomie.

De plus, ils peuvent venir accompagnés, rencontrent d’autres personnes à la Maison des parents et se sentent moins isolés que dans une chambre d’hôpital. L’esprit est très familial avec des bénévoles et surtout ils n’ont pas l’impression d’être réhospitalisés. Cela joue sur leur moral.

C’est une bonne alternative mais la proximité est une condition indispensable car si le malade a un souci, l’hôpital doit être facilement accessible. »

« Nous sommes rassurés de les savoir à proximité »

Annick, cadre de santé au service d’hospitalisation radiothérapie à l’Institut Gustave Roussy

« J’accueille des patients pour de la radiothérapie et ils sont nombreux à bénéficier de l’hôtel hospitalier, notamment lorsqu’ils vivent à plus de cinquante kilomètres de l’IGR, qu’ils sont seuls ou qu’ils ont des difficultés à se rendre à l’Institut.

L’hôtel est une bonne alternative, les patients apprécient notamment lorsqu’ils sont en traitement long car ils peuvent rentrer chez eux les weekends ce qui n’est pas le cas lors d’une hospitalisation. L’autre avantage c’est qu’ils peuvent être accompagnés à l’hôtel.

Ce soutien est important pour leur moral. Ils gagnent en liberté, tout en ayant une certaine sécurité en étant proche de l’hôpital. En tant que soignants, nous sommes également rassurés de les savoir à proximité.

Bien entendu, lorsque nous jugeons qu’un patient n’est plus en mesure d’aller à l’hôtel, nous l’hospitalisons ou le dirigeons vers un service de soins de suite. Nous nous adaptons au patient, à son traitement et à sa capacité à s’autogérer. »

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