Des étudiants en soins infirmiers ouvrent des cagnottes en ligne pour financer leurs études

Certains étudiants en soins infirmiers sollicitent la solidarité des internautes pour financer leurs études en IFSI via des cagnottes en ligne. Un coup de pouce non négligeable pour les uns, un coup d'épée dans l'eau pour d'autres, tant le montant des frais à engager finit par peser sur leur budget. Et une démarche dont le succès repose essentiellement sur la capacité des porteurs à créer le buzz autour de leur cagnotte.

Des étudiants en soins infirmiers ouvrent des cagnottes en ligne pour financer leurs étudesLes plateformes de cagnottes solidaires publient de plus en plus d'appels à l'aide financière de la part d'étudiants en soins infirmiers, à côté des demandes plus classiques de financement de missions humanitaires ou de stages à l'étranger.

Les ESI ont-ils plus de mal qu'avant à joindre les deux bouts ? Difficile à dire. « Au départ, je ne voulais pas le faire, témoigne Mélanie, 25 ans et en première année. J'avais l'impression de quémander. Alors que je donnais facilement à des associations, je trouvais difficile à accepter que ce soit moi qui demande. » Sabrina, 33 ans et en première année également, a aussi hésité : « j'avais plus ou moins honte et je n'osais pas. Finalement je l'ai fait car je n'avais pas le choix ».

Succès mitigé

Les cagnottes qu'elles ont ouvert ont rencontré un succès mitigé. Comme pour tous les appels à financement participatif, leur succès réside dans le buzz créé autour d'elles par le bouche à oreille ou les réseaux sociaux. Mélanie a diffusé les infos sur sa cagnotte à toutes ses connaissances et obtenu en 45 jours 1000€ (« un coup de pouce appréciable ! ») avant que les dons stagnent. Des personnes qu'elles ne connaissait pas du tout ont participé. Sabrina a reçu quant à elle 400€ dont deux dons de 100€, qui vont l'aider à payer ses frais d'essence, d'autoroute et de logement (l'ISFI est à 200 km de chez elle).

Gaëlle, en deuxième année, n'a récolté en revanche que 30€. Très loin des 320€ de frais d'essence mensuels pour se rendre à l'école, à 80km, qui absorbent la moitié de son allocation de Pôle emploi... Pour elle, surtout, la cagnotte n'a pas répondu à ses espoirs : elle s'afflige de voir le peu d'écho que rencontre son appel à l'aide, même si ses camarades de promo l'ont partagé.

Les étudiants qui publient ces cagnottes semblent plus souvent être en reconversion professionnelle ou en poursuite d'études et non pas de jeunes bacheliers. C'est le cas, en tout cas, de Mélanie, Sabrina et Gaëlle. Pour ces femmes déjà engagées dans la vie professionnelle et indépendantes, la reprise d'études en IFSI se conjugue avec une très forte baisse de revenus. Pendant trois ans. Et avec peu de perspectives de pouvoir rembourser un (nouveau) prêt bancaire.

Coûteuse reconversion

Sabrina a été coiffeuse pendant 15 ans avant de devenir aide-soignante pendant cinq ans et de réussir le concours d'entrée dans un IFSI privé. Elle a du quitter son emploi entrer à l'IFSI et touche une allocation chômage. Ses revenus ont diminué de plus d'un tiers. « J'avais des prêts et je n'ai pas pu mettre d'argent de côté, évoque-t-elle. Et ma famille ne peut pas trop m'aider. » Depuis plusieurs mois, elle ne parvient plus à payer ses factures ni son prêt immobilier. Même difficultés pour Gaëlle, ex-aide médico-psychologique et ex-ASH, qui vit seule avec ses trois enfants... Quant à Mélanie, elle a été auxiliaire de puériculture pendant quatre ans avant d'intégrer une école d'infirmière. Son employeur a accepté de financer ses frais de formation (21000€) mais elle s'est retrouvée sans aucun revenu.

Avant de créer une cagnotte, en parallèle, chacune a cherché des solutions dans toutes les directions (CIF, CAF, etc.). Mais elles entrent difficilement dans les « cases » de l'administration... L'une d'elle travaille trois nuits par mois dans l'établissement qui l'employait. L'autre loue sa résidence principale quand elle passe la semaine dans une famille dans la ville où elle étudie. Une autre rend des petits services... Après avoir frappé à toutes les portes sans succès, Mélanie a découvert que le Conseil régional d'Ile-de-France pouvait lui verser une bourse étudiante de 380€ mensuels. 

Pour Sabrina, la cagnotte a un goût un peu amer : elle a dû essuyer les réflexions « déstabilisantes » voire « méchantes » de certains ESI qui ne comprenaient pas sa démarche. Reconnaissante pour l'aide obtenue, Mélanie s'interroge pour sa part sur « le grand écart entre le manque d'infirmières sur le terrain et la difficulté pour des étudiants de financer leurs études. Il ne devrait pas y avoir une si grande difficulté pour poursuivre ses études sereinement dans un secteur pourtant demandeur comme celui de la santé en France ». L'essor des cagnottes étudiantes signe d'un dysfonctionnement ?

Géraldine Langlois

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