Les infirmiers libéraux face à la prise en charge médicamenteuse à domicile

Dans le cadre d'un projet de recherche, une infirmière libérale mène un vaste état des lieux des pratiques et difficultés des infirmiers libéraux face à la prise en charge médicamenteuse des patients à domicile.

Les infirmiers libéraux face à la prise en charge médicamenteuse à domicile

©Inllusion/Fotolia

Pour Sophie Marseillac-Bullones, infirmière libérale et actuellement étudiante en master menant au Diplôme d'Etat d'infirmier de pratique avancée (DE IPA) à Toulouse, l’analyse de pratiques autour du circuit du médicament s’est « naturellement imposée ». « C’est devenu ma spécialité d’enseignement, explique-t-elle, et cela m’a amenée à m’interroger sur les pratiques des infirmières libérales, constatant une certaine hétérogénéité d’un cabinet à l’autre, avec, parfois, des prises de risques », notamment pour des patients à domicile, de plus en plus « polymédiqués, souffrant de polypathologies, dans un contexte où la technicité augmente, et où la prise en charge est plus rapide du fait du recours à l’ambulatoire. »

Paradoxalement, « dans l’exercice de notre fonction d’Infirmière libérale, nous avons des recommandations mais il  il apparaît qu’il n’y a que peu de choses concernant le médicament alors que c’est une priorité nationale. J’ai voulu comprendre quels étaient les freins juridiques, culturels, pratiques. » C’est ainsi que Sophie Marseillac-Bullones a choisi d’en faire son projet de recherche, afin de « transformer son ressenti en véritable enquête exploratoire. » Il y a un peu plus d’un mois, elle a mis en ligne un questionnaire précis, reprenant les « recommandations de la HAS, adoptables dans notre quotidien au domicile des patients et déjà validées par des comités scientifiques. »

Il restera accessible au moins jusqu’à septembre, afin de mobiliser le plus fort taux de réponses possibles, et ce, à échelle nationale. « Pour l’instant, une trentaine de cabinets a joué le jeu ».

Une formation en « blended learning »

Ce projet est réalisé en partenariat avec la Croix-Rouge de Toulouse, par le biais de Véronique Natoli, coordinatrice de projets e-Learning. Sophie Marseillac-Bullones a travaillé pour le CRFP (Centre régional de formation professionnelle) de la Croix-rouge Occitanie (site de Toulouse) à l'adaptation d’une formation sur la sécurisation du circuit du médicament sous la forme d’un dispositif pédagogique en « blended learning » (5 modules d’1h30 et 1 classe virtuelle ) qui permet de prendre en compte toutes les difficultés rencontrées par les professionnels face à la prise en charge médicamenteuse (et qui aborde les bases théoriques, des cas concrets, des quizz évaluatifs, la création de son propre cas clinique et son projet d’amélioration des pratiques…).

Pour Véronique Natoli, « le e-Learning apporte une réponse aux besoin de formation continue des professionnels de santé dans un contexte de pénurie des ressources humaines. » Cette formation a bénéficié d’un test grandeur nature au sein de deux cliniques partenaires (clinique de Verdaich et clinique des Cèdres) et est à présent opérationnelle.

La nécessité de créer des modules complémentaires concernant des problématiques professionnelles spécifiques (psychiatrie, handicap, personnes âgées…) s’est imposée rapidement. Le choix s’est porté sur la formation des infirmières libérales en lien avec le contexte actuel de diminution des durées d’hospitalisation et a été corroboré par le travail de recherche de Sophie Marceillac-Bullones. Car finalement, si des documents existent sur la prise de médicaments à l’hôpital, dans les cliniques ou institutions, « il semblerait qu’il y ait peu de documents de référence sur le circuit extérieur (officine et à domicile) qui précisent comment adapter les recommandations existantes à la particularité du travail des infirmières libérales qui sont souvent seules durant leur activité professionnelles et ne peuvent s’appuyer sur une équipe et un circuit protocolisé. »

Actuellement  la formation sécurisation du circuit du médicament en e-Learning pour les professionnels des structures de santé proposée par le CRFP est en phase de commercialisation. Le scénario pédagogique du module complémentaire pour les infirmières libérales se base sur la réflexion professionnelle et l’adaptation des recommandations générales à leur pratique en l’attente de recommandations spécifiques à l’issue du travail de recherche en cours.

Donner la parole aux Infirmières libérales

Dans le cadre de ce module, le travail de Sophie Marseillac-Bullones a vocation à recueillir des données qui pourront être ensuite utilisées par les autorités compétentes. « Quand j’ai commencé à faire tourner le questionnaire, les réactions des infirmières ont été enthousiastes. ‘’Enfin, on peut discuter de nos problématiques !’’ ont-elles toutes lancé. Il y avait une vraie attente de leur côté », a-t-elle constaté. « Les médicaments sont-ils toujours délivrés sur présentation de l’original d’une ordonnance individuelle, datée, signée et en cours de validité ? », « Êtes-vous force de proposition dans la prise en charge thérapeutique auprès du médecin traitant ? ( prise en compte de la déglutition, des effets indésirables …) » ou encore « Détenez-vous des stocks ‘’traitements-patients’’ au sein de votre structure ( hors domicile) » ?, autant de questions auxquelles les Idels pourront répondre. « Mon souhait serait que l’ARS trouve un intérêt à ce projet et le soutienne voire même qu’il soit possible d’établir …un partenariat, car une fois les résultats analysés, j’aimerais qu’ils soient publiés afin d’objectiver les pratiques », explique Sophie Marseillac-Bullones.

En attendant, l’enquête reste une priorité pour partir sur des bases sérieuses et elle souhaite s’adresser aux professionnelles qui se sentent concernées par cette problématique en leur demandant d’y répondre par ce lien.

Delphine Bauer

Abonnez-vous gratuitement à la newsletter Actusoins

Abonnez-vous à la newsletter des soignants :

Faire un don

Vous avez aimé cet article ? Faites un don pour nous aider à vous fournir du contenu de qualité !

faire un don

Réagir à cet article

retour haut de page
370 rq / 5,415 sec