Les infirmier(e)s en portrait dans ActuSoins : Que sont-ils devenus ? (7)

Cela fait près de cinq ans qu’ActuSoins part à la rencontre de soignants un peu partout en France. Certains ont des initiatives à mettre en lumière. D’autres exercent dans des services méconnus. Tous ont un parcours qui sort de l’ordinaire. Nous avons voulu prendre des nouvelles.

Joséphine Cossart infirmière en portrait dans ActuSoins

Joséphine Cossart
©DR/2011

Retrouvons Joséphine Cossart infirmière : 

Nous avions rencontré Joséphine à l’occasion d’une journée de réflexion sur le don d’organe. Joséphine était alors coordinatrice de prélèvements d’organes et s’impliquait énormément dans cette cause. Depuis, elle a complètement changé de secteur d’activité.

« Je suis rentrée à l’école des cadres en 2011. À la sortie, j’ai pris un poste aux urgences. Puis je suis devenue maman en 2013 et j’ai fait le choix de prendre un poste en oncologie médicale. Là encore, j’ai pris conscience que j’avais besoin d’un poste où je pouvais prendre le temps, être juste là, pour accompagner les gens ».

Joséphine n’a pas gardé de lien particulier avec la coordination des dons d’organes. « J’ai cependant fait au sein de mon service une sensibilisation particulière pour le prélèvement de cornées. Mon équipe n’est donc pas surprise de voir arriver  dans mon service la coordinatrice de l’hôpital pour envisager ce type de démarche ».

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Joséphine : Sauver la vie après la mort

Joséphine Cossart est infirmière coordinatrice de prélèvements d’organes et de tissus. Cette année, à l’occasion de la onzième journée nationale de réflexion sur le don d’organes, elle a organisé un colloque à l’hôpital Cochin.

Le long travail nécessaire à la préparation de ce rassemblement a néanmoins été récompensé par la présence d’un auditoire professionnel en quête de sensibilisation et de connaissance sur un sujet peu évoqué au quotidien dans les services : la justice face aux prélèvements d’organes.L’amphithéâtre aurait pu accueillir plus de 200 personnes. Malheureusement pour Joséphine, la journée du 22 juin, dédiée à la réflexion sur le prélèvement d’organes et la greffe, n’aura attirée dans son hôpital, qu’une soixantaine d’invités.

L’idée de cette table ronde est venue de Joséphine. Il s’agissait de réunir les protagonistes d’une chaîne d’urgences sortant du soin traditionnel. Assis autour d’elle, attendant ses consignes et ses remarques, un médecin chef d’une brigade de sapeurs-pompiers, un médecin anesthésiste, un procureur de la république, un médecin légiste et un docteur en philosophie pour répondre aux questions éthiques et juridiques soulevées par le don d’organes.

« Le but est de réfléchir autour des problèmes auxquels nous sommes confrontés pendant une démarche de prélèvement. Cela va de l’autorisation donnée par le procureur lors d’une mort suspecte, au recueil de la non opposition du défunt auprès des proches, en passant par les difficultés pour le personnel de garder parfois plusieurs jours un patient en état de mort encéphalique avec pour seul objectif la conservation de ses organes en vue d’un don. Parfois les soignants pensent qu’ils bloquent un lit inutilement. Il faut savoir qu’un donneur d’organes peut être à l’origine de plusieurs greffes, donc de plusieurs vies sauvées » explique Joséphine.

Lors du débat, la jeune femme est dynamique. Elle n’hésite pas à interroger sur les pratiques, à prendre position face à l’assemblée. « Je suis d’une nature pugnace », déclarera-t-elle par la suite.

Une coordination "du début jusqu'à la fin"

Si Joséphine s’implique tant dans cette cause, c’est que son métier la passionne. Infirmière coordinatrice de dons d’organes depuis 7 ans, son quotidien est rythmé par un travail à la fois administratif et humain. Tout d’abord, elle est chargée de recenser les donneurs potentiels au sein des différents services. Elle met en place des procédures, elle informe, elle coordonne.

Lorsqu’elle est d’astreinte pour 24 h - 12 fois par mois -, elle participe « du début jusqu’à la fin », à la démarche de prélèvement d’organes. C’est dans ce cadre qu’elle s’entretient avec les proches des défunts. En France, d’après la loi, toute personne est considérée consentante au don d’éléments de son corps après sa mort si elle n’a pas manifesté d’opposition de son vivant. Joséphine recherche donc dans le registre national des refus, géré par l’Agence de la biomédecine, et interroge les familles sur la position du défunt.

Puis la course contre la montre commence pour elle : examens de sécurité sanitaire, élaboration d’un dossier anonyme informatisé de donneur, organisation des transferts vers le bloc opératoire, accueil et coordination des équipes chirurgicales, vérification du matériel et de la restauration tégumentaire du corps mort, toilette mortuaire. « Je commence à avoir l’habitude, je ne travaille qu’avec des morts finalement. Par contre, ce n’est pas le cas des IBODE qui assistent les chirurgiens. Cela peut être un moment difficile pour elles, d’où la nécessité de les accompagner dans ce moment particulier », souligne Joséphine.

À l’évocation de la mort, elle est d’ailleurs très au clair. « En prenant ce poste, je savais que j’allais la vivre au quotidien et dans des conditions brutales. Il me semble qu’une mort inattendue – les donneurs d’organes sont le plus souvent des victimes d’accidents vasculaires cérébraux - , demande un travail psychologique et psychique bien particulier. Lorsqu’en une seule semaine, on reçoit 2 enfants de 4 et 15 ans, ça donne à réfléchir ».

À court terme, Joséphine souhaiterait devenir cadre dans un service d’urgences, son premier amour professionnel. « J’ai une passion dévorante pour ce que je fais. J’ai la chance de côtoyer plein de personnes différentes et d’être très autonome dans mon action. Néanmoins, je pense que la durée de carrière d’une infirmière coordinatrice de dons d’organes est encore plus basse que celle d’une infirmière soignante. J’ai pris l’habitude de m’auto-gérer. C’est pourquoi je préfère m’orienter aujourd’hui vers une fonction d’encadrement », explique-t-elle.

Au regard de la détermination et du franc-parler de la jeune femme lors du colloque et de l’entretien individuel qui s’en est suivi, mais aussi de son parcours atypique, il ne fait nul doute que Joséphine parviendra à aller au bout de ses envies et de ses passions. Bonne route.

Malika Surbled

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